Domaine français
Parution Août 2016
ISBN 978-2-88927-342-3
240 pages
Format: 140x210 mm
Disponible

Domaine français
Disponible

Poche
Parution Sep 2021
ISBN 978-2-88927-937-1
272 pages
Format: 105x165 mm
Disponible

Préface de Michel Thévoz

Michel Layaz

Louis Soutter, probablement

Domaine français
Parution Août 2016
ISBN 978-2-88927-342-3
240 pages
Format: 140x210 mm

Domaine français
Parution Sep 2021
ISBN 978-2-88927-937-1
272 pages
Format: 105x165 mm

Préface de Michel Thévoz

Résumé

Aujourd’hui mondialement reconnus, les dessins et les peintures de Louis Soutter (1871- 1942) n’ont été remarqués de son vivant que par un cercle restreint de connaisseurs. Parmi eux, Le Corbusier et Jean Giono ont été subjugués par le trait libre de l’artiste, vrai sismographe de l’âme. Formé à la peinture académique, violoniste talentueux, marié à une riche Américaine, puis directeur de l’Ecole des beaux-arts de Colorado Springs, Soutter mène pourtant, dès 1902, une vie d’errance jusqu’à son internement forcé à l’âge de 52 ans dans un asile pour vieillards du Jura suisse. C’est là qu’il parvient à donner forme à l’une des œuvres les plus inclassables de l’histoire de l’art.
Il fallait une langue souple et subtile pour faire ressentir l’étrangeté de cet homme et nous entraîner le long d’une vie marquée par la solitude, ponctuée aussi par quelques éclats de lumière et transportée surtout par la puissance de la création.

 

Auteur

Michel Layaz

Né à Fribourg en 1963, Michel Layaz fait partie des principaux auteurs romands contemporains. Commencée en 1993 avec Quartier Terre (L’Âge d’Homme), son œuvre littéraire compte aujourd’hui une quinzaine de romans, dont plusieurs primés. Parmi ceux-ci Ci-gisent (Zoé, 1998), écrit à la suite d’un séjour à l’Institut suisse de Rome, Les Larmes de ma mère (Zoé, 2003 ; Prix Dentan et prix des auditeurs de la Radio Suisse romande), ou encore la Joyeuse complainte de l’idiot (Zoé, 2004). Plus récemment, son texte Louis Soutter, probablement (2016) remporte un prix de littérature suisse, le prix Bibliomedia et le prix Régis de Courten; Sans Silke (2019), quant à lui, obtient le prix Rambert. En 2021 paraît Les Vies de Chevrolet.

Agenda

Dim. 13.10.2024 , 19h00

en rencontre Vleel

En savoir +

Jeu. 7.11.2024 , 19h00

aux Sandales d’Empédocle (Besançon)

En savoir +

Ven. 8.11.2024 , 17h00

en dédicace chez Payot Nyon

Sam. 9.11.2024 , 11h00

en dédicace chez Payot La Chaux-de-Fonds

Distinctions

Michel Layaz, lauréat du prix suisse de littérature 2017 pour  Louis Soutter, probablement 

Michel Layaz, lauréat du prix Bibliomedia 2017 pour  Louis Soutter, probablement 

Michel Layaz, lauréat du Prix Régis de Courten pour  Louis Soutter, probablement 

Dans les médias

« Cette vie inimitable, l’écrivain suisse Michel Layaz en scande et en date à la perfection les instants cruciaux. Une narration qui n’est pas celle de la biographie historique, mais fait la part belle tant à l’exactitude des faits qu’à leurs dimensions intimement poétique et tragique. Une grande réussite. » François Angelier

« Du violoniste, du peintre, du « fou » vaudois, Michel Layaz fait un frère d’âme dans une biographie qui n’en est pas une ( le « probablement » du titre ). D’une écriture riche et inspirée, il plonge dans les tourments de Soutter, dans ses instants de grâce aussi, quand un crayon à la main, le reclus, l’exclu libérait « les formes tapies là », les entraînant « dans des compositions grouillantes, des cohortes d’aubes et de crépuscules », se débarrassant « de ses craintes, douleurs, tortures, secrets intimes et désirs bannis ». » P.B.

« Ce livre est dense et remarquablement écrit, il laisse peu de temps morts ou faibles au lecteur… Pourquoi ? Et bien parce que cette vie Louis Soutter la mène en perpétuel mouvement, qu’il marche, joue du violon ou dessine. Parce que l’auteur semble regarder un effet stroboscopique permanent. Parce qu’ils – le livre et l’auteur – cherchent à cerner ce Louis et que l’adverbe du titre ne laisse rien de fixe, de définitif, d’immobile. »

Une chronique Noé Gaillard à lire en entier ici

« Michel Layaz, en cueilleur d’impressions, met à nu, dans Louis Soutter, probablement, les forces inépuisables et contraires qui animaient le peintre suisse de la première moitié du XXe siècle. Publié aux Éditions Zoé en 2016, l’ouvrage dépasse amplement les contours d’une biographie. Intense ! »

« … [Michel Layaz] raconte avec grâce le destin tortueux de cet artiste maudit, étiqueté comme fou parce qu'inclassable. (…) » Estelle Lenartowicz

D’une admiration profonde et sincère pour Louis Soutter, Michel Layaz tire un chant qui se met avec grâce, empathie et subtilité au diapason du peintre au destin solitaire et tragique. La vie de Soutter, né à Morges en 1871 dans une famille bourgeoise, violoniste de talent, dessinateur précoce, architecte, marié à une belle Américaine qui l’emmène chez elle à Colorado Springs et le propulse directeur de l’Ecole des beaux-arts de la ville, revenant malade et seul chez ses parents six ans plus tard pour finir sa vie dans un asile pour vieillards à Ballaigues, méritait bien cette attention subtile, faite autant d’informations biographiques coupantes que d’une tentative quasi suppliante d’entrer dans la tête et le cœur du vagabond génial.

C’est que Louis Soutter marche, des heures durant, n’aime que ça, s’évader de l’asile où sa famille l’a relégué, lassée de son incapacité à vivre la vie sociale que l’on attend de lui.

Michel Layaz perçoit, et rend d’une langue à vif, aérienne, ensoleillée et désespérée à la fois, les tremblements intérieurs qui agitent Louis tout au long de sa vie. On le voit vivre, névrosé mais pas fou, et dépérir, mais vivre quand même, enfant trop frêle et sensible, adulte inadapté, arrêtant de suivre la partition quand l’émotion est trop forte, fuyant la foule, enterrant sa jeune sœur Jeanne, dépensant en costumes coûteux l’argent qu’il n’a pas mais heureux vêtu en dandy, maigre car affamé d’autre chose – et surtout survivre, et même se sauver, par le dessin qu’il redécouvre en arrivant à Ballaigues.

L’affection de son petit-cousin Le Corbusier et de l’écrivain Jean Giono, fascinés par ses toiles inclassables, ténébreuses, érotiques ou morbides, le tire un tant soit peu de sa prison. Il meurt en 1942. En 1961, une première rétrospective se tient au Musée des beaux-arts de Lausanne. 

Isabelle Faconnier

« … le génie de l'auteur est de tracer cette vie sensible [celle de Louis Soutter], si riche en contradictions. On ne lit pas une biographie mais un texte à la langue si souple qu'elle évoque les pas du marcheur. » Chantal Nicolet Schori (Librairie la Méridienne, La Chaux-de-Fonds)

 

« D'une admiration sincère et profonde pour Louis Soutter, Michal Layaz tire un chant qui se met avec grâce, empathie et subtilité au diapason du peintre au destin solitaire et tragique. (…) [Une] attention subtile , faite autant d'informations biographiques coupantes que d'une tentative quasi suppliante d'entrer dans la tête et le cœur du vagabond génial. (…)
Michel Layaz perçoit, et rend d'une langue à vif, aérienne, ensoleillée et désespérée à la fois, les tremblements intérieurs qui agitent Louis tout au long de sa vie. On le voit vivre, névrosé mais pas fou, et dépérir, mais vivre quand même, enfant trop frêle et sensible, adulte inadapté, arrêtant de suivre la partition quand l'émotion est trop forte (…). » Isabelle Falconnier

« Michel Layaz suit pas à pas l’artiste malheureux, dans un beau récit biographique «probable»

Une réussite: le portrait du peintre est convaincant. Layaz adopte une vue plongeante: tableaux de la bourgeoisie romande bien pensante mais friande de ragots; aperçus de l’effervescence artistique et intellectuelle de l’époque; scènes de famille sous le regard jugeant de la mère et celui, fuyant, du père. Il use du «on», qui signale parfois le narrateur, tenant à distance son empathie, parfois l’entourage de Soutter.

Les dialogues, rares, se glissent dans le flux du récit, souvent au conditionnel ou en interrogation. Bref, Michel Layaz use de sa liberté avec tact. On le sent très documenté sans que cette érudition pèse. Il sait rendre la beauté des paysages que traverse le marcheur obsessionnel, et élude avec habileté la difficulté à décrire avec des mots cet art si singulier (…). En conclusion, il réussit à cerner le malaise qui saisit devant l’œuvre de Soutter (…). » Isabelle Rüf

« … La plume de l'écrivain est précise, respectueuse et émouvante pour rendre hommage à ce formidable artiste (…). » Stéphanie Roch

« … Pour mener à bien cette tentative de restitution d'une vie, [Michel Layaz] a délaissé le classique continuum du roman, au profit d'un dispositif qui consiste à progresser de date en date, ce qui lui permet, tout en recontextualisant les faits, de mettre en relief ce qu'a de permanent le caractère du personnage comme ce qu'il a d'unique. Autant d'éléments de dramatisation, de points d'intensité, qui donnent au livre sa scansion tout en rythmant le pathétique d'un destin. (…) » Richard Blin

 
Une critique de Jean-Marie Félix

 

Récit d'un destin exceptionnel servi par une langue somptueuse, « Louis Soutter, probablement » paru aux Editions Zoé, c'est le dernier roman de l'auteur lausannois Michel Layaz. 

L'une des propositions les plus enthousiasmantes de cette rentrée littéraire riche de quelque 560 nouveautés, « Louis Soutter, probablement » s'affirme comme un roman et non pas une étude ou un récit biographique. Un roman, donc une fiction, où s'exprime la vérité de l'écrivain et amateur d'art qu'est Layaz.

Avec une empathie empreinte de respect, l'auteur accompagne son sujet au fil des années, depuis l'adolescence de Louis Soutter jusqu'à la mort de celui-ci, à travers des chapitres courts et situés dans le temps. Rien n'y est affirmé, tout y est supposé. Et c'est là que réside la réussite de ce livre: sur le probablement qu'annonce son titre. Layaz multiplie les hypothèses en employant le conditionnel, multiplie les interrogations sans forcément trancher.

Michel Layaz sur les traces de Louis Soutter

Au fil des pages, se dessine la silhouette dégingandée de Louis Soutter, qui prend corps. Ce corps long et osseux, comme le reflet des inquiétantes figures que le peintre a expulsées sur des papiers de fortunes dès sa relégation dans un asile pour déshérités. C'est là qu'il a passé les vingt dernières années de sa vie. C'est là qu'il a élaboré son œuvre graphique, loin des regards avisés.

On n'est pas étonné de retrouver Michel Layaz sur les traces d'un des créateurs les plus marquants du début du 20e siècle. Lui qui, dans ses jeunes années, a coanimé une galerie d'art marginale du côté de Lausanne. Lui, dont l'épouse est une historienne de l'art renommée, dont le père est lui-même peintre et journaliste spécialisé dans le domaine des beaux-arts. 

Entre relations familiales et inadéquation sociale

La plupart de ses romans témoignent de son intérêt pour les relations familiales complexes. « Les Larmes de ma mère », livre publié en 2003 (Prix Michel-Dentan, Prix des auditeurs de la RSR) en témoignait largement.

Autre thème récurrent dans son œuvre: l'inadéquation sociale, la mise à l'écart d’individus considérés comme inadaptés à notre société très normative. C'est exactement cela qu'on trouve une fois encore dans « Louis Soutter, probablement ».

Jean-Marie Felix

 

« … Tout l'art du romancier consiste à découvrir par le pouvoir de la fiction ce que les livres d'historie et les biographies ne révèlent pas (…)
Si avec Louis Soutter, probablement l'auteur semblait se lancer sur un sentier inconnu en s'essayant au genre des vies de peintes, (…) il poursuit, tout en continuant de creuser les thèmes essentiels de son œuvre, la critique d'une société rigide et bornée à laquelle il oppose une langue poétique, tantôt acérée, tantôt délirante.
Ce onzième roman sonne comme le refus de se plier aux normes d'une société qui coupe les ailes de ceux à qui on inflige, comme à Louis Soutter, une douloureuse réclusion à vie. » Romain Buffat

« …Écrivain rompu au langage de l'art, [Michel Layaz] consacre [à Louis Soutter] cette biographie où règnent une tension poétique délicate et un sentiment de pudeur et de retenue. La narration romanesque des situations et des épisodes alterne avec le registre fantaisiste et la satire de la société bourgeoise de l'époque. » Mario Guastoni

On ne saurait mieux écrire, mieux imaginer la vie intérieure d'un homme aussi tourmenté qu'armé d'une telle élégance de style. Chapeau bas, donc. Et au-delà de toute probabilité, sans la moindre once de doute, on pourra dire de Louis Soutter, probablement ceci : un grand livre, assurément.

RongeMaille

Retrouvez l'article intégral ici : http://letrianglemasque.blogspot.fr/

« …Louis a des  »jambes en bâton« .  »Ses côtes saillantes«  laissent deviner sous sa chair fine  »les os du squelette« . Il avance  »le haut de son corps en avant, courbé comme un roseau qui plie« . C'est L'Homme qui marche de Giacometti. Le flash est immédiat. L'image ne vous lâche plus. Elle scintille au fil des pages et laisse une très forte empreinte, à la fois esthétique et métyphysique, sur le nouvel opus de Michel Layaz: Louis Soutter, probablement. En réinventant Louis Soutter, le romancier (…) a-t-il songé à la très célèbre sculpture de Giacometti? Probablement. Enfin… on ne sait pas. Comme on ne sait pas si toutes les pensées et les paroles attribuées à Louis sont siennes; si toutes les situations, aussi bien miraculeuses qu'infernales, ont été vécues par lui. Car tout est vrai et rien ne l'est dans cette magnifique biographie romancée qui tresse avec aisance réalité et fiction. (…) » Ghania Adamo

« … [un] beau livre, où l'indignation contre les causes objectives d'une vie et d'une œuvre gâchées apparaît en filigrane de tous les épisodes sans jamais ternir la lucidité d'analyses (…) » Maurice Mourier

« … Grâce à son don d’empathie et à sa générosité, Michel Layaz a parfaitement réussi à se glisser dans l’âme et le corps de celui qui fut avant tout, même incompris, un grand artiste (…) [Un] magnifique roman de Michel Layaz qui nous interpelle en profondeur. » Gilberte Favre

« …Michel Layaz réussit son tour de force. Le lecteur entre dans le texte avec une impression de vérité. Tout sonne juste, alors que la réalité de choses reste historiquement floue. Les phrases coulent. Les caractères évoluent. (…) » Etienne Dumont

L'article en entier ici

« …[Michel Layaz] se glisse pour la première fois dans une vraie vie. Il l'accompagne sans prendre parti. Chemine avec ses torpeurs et ses failles. Soulève ses éclats. La plume sensible, sensuelle presque et éclairée par de longues recherches, il plonge dans l'implacable réalité d'une chute sans fin, celle d'un homme, d'un peintre formé à l'académisme, d'un violioniste talentueux, d'un artiste passé dans la marge. Un vrai vertige… (…) » Florence Millioud Henriques

« …Dans une belle langue et en empathie avec son personnage, Michel Layaz parcourt (…) la vie de celui-ci, non sans évoquer au passage le contexte historique, social ou artistique. (…) » Pierre Jeanneret

« …Généralement taquine et vagabonde, l'écriture de Michel Layaz, dès qu'il s'agit de la peinture de Louis Soutter, se densifie, prend corps et chair. On sent toute la fascination de l'auteur pour cette œuvre et cette force créatrice inextinguible. (…) Un livre à l'image de son héros. Libre. » Anne Vivier

« L'écriture subtile de Michel Layaz, tout en nuances et en retenue, en délicatesse et en poésie, restitue l'homme dans toute son intimité, met en évidence son moi profond, sa vie intérieure perturbée, sa très grande sensibilité. »

« Michel Layaz, en cueilleur d’impressions, met à nu, dans Louis Soutter, probablement, les forces inépuisables et contraires qui animaient le peintre suisse de la première moitié du XXe siècle. Publié aux Éditions Zoé en 2016, l’ouvrage dépasse amplement les contours d’une biographie. Intense ! »

Un article de Laure-Elie Hoegen à lire en entier ici

Coups de cœur

« Avec subtilité et finesse, par touches de couleurs successives, comme dans un tableau, l'auteur nous fait partager le parcours d'errance de Louis Soutter. » Jacqueline Merk

« Nous marchons beaucoup dans ce livre mais sans éprouver de fatigue tant le cheminement est passionnant. »

La vie solitaire de cet artiste inclassable est ici dépeinte et imaginée avec une profonde empathie. On y découvre l'âme lumineuse d'un homme nichée derrière les œuvres.

Au départ. Ne rien connaître de Louis Soutter, si ce n’est, probablement, son nom. Ne rien savoir de son œuvre sauf peut-être un souvenir: des personnages épais, noirs, entraperçus dans un livre d’art comme enfant.
Et au tomber dans l’histoire, engloutir une vie, deviner, imaginer, compléter, y croire. Reconnaître une époque. Etre touchée. Comme une barque souhaiter par moment offrir son bras à Louis.
Dans la rue le lendemain, arrêter son regard sur les quelques petits vieux voûtés, marchant seul, chapeau en crâne, en main, regards sur les pavés ou sur les toits. Se demander.
Se rappeler surtout un 28 juillet 2015, pas loin des pyramides de Vidy, proche de minuit. Michel soudain de confier ce qu’il a sur le feu. «Vous connaissez Louis Soutter?». Certains de répondre non, d’autres oui, d’autres un peu. Et il raconte – comme il le fait si bien, en digressant, hésitant, flot de pensées en parallèle, curieux, passionné, les paumes avec – ce livre à naître. Ses doutes (devrait-il ordonner chronologiquement les événements ?). Ses recherches. Sa prochaine visite à Ballaigues. Et souvent de répéter avec effroi : pendant dix-neuf ans dans un asile, oublié de tous.
Dans Louis Soutter, probablement, Michel Layaz rend avec brio – sur un déroulé d’années – tant l’émotion que la matière, les couleurs, les instants d’immobilité ou de terreur. Et au contact de sa plume, de son Louis, et comme la peinture de l’artiste, on se délie de la page avec un regard un peu voilé sur les choses, un regard un peu différent.

Cyrielle

 

Coup de cœur Rentrée littéraire !

Lu et conseillé par Valérie

Droits vendus

Italien
Acquéreur Pagine d'Arte
Année 2022

Allemand
Acquéreur Verlag die Brotsuppe
Année 2017

Extrait

Septembre 1887

Jeanne, Jeanne, descends ! Qu’est-ce que tu fais ? maman ne veut pas ! Louis crispait ses doigts, s’inquiétait de voir sa sœur perchée au milieu de l’arbre, un bras griffé, sa robe froissée par l’écorce. J’habite ma maison, j’invente de la lumière avec les feuilles. Et Jeanne qui bougeait une branche du frêne, jouait avec un rai de soleil, allumait et éteignait la lampe de sa maison. C’est joli, tu ne trouves pas ?

Les paupières battaient à toute vitesse.
Jeanne aimait les arbres.
Elle les aimait comme elle aimait les fleurs, les poissons, les vers de terre, les limaces, les souris, la moisissure, les bestioles sans nom, comme elle aimait lancer du pain aux canards et aux oiseaux, surtout à ceux qui – hop ! – montent à huit mille mètres pour faire le tour du monde. Jeanne aimait aussi cracher dans le noir, pincer les nuages du bout des doigts, se chatouiller le ventre et tout ce qu’on lui interdisait de toucher. Elle observa les fourmis qui s’activaient le long du frêne et de son avant-bras. Comme tous les enfants, elle avait sur les insectes un droit de vie et de mort. Je ne vous ferai aucun mal, murmura-t-elle, et même si je ne sais pas comment, vous aussi vous devez respirer. Descends ! Jeanne, descends ! insista Louis. Tu dois encore chanter ; après si tu veux nous reviendrons. Louis ouvrit les bras pour recevoir sa sœur. Il surestima sa force, perdit l’équilibre, et tous deux, enlacés, tombèrent. Jeanne riait de bon cœur, une joie sans méchanceté, sans rides. Elle se désolait d’avoir un frère qui avait moins de forces qu’un lapin. Louis fronça les sourcils. Ce n’est pas vrai, s’alarma-t-elle, tu as beaucoup plus de forces qu’un lapin. Jeanne ne savait pas mentir. À côté d’eux, sans qu’on ne l’entende, était arrivé le chien qui n’appartenait à personne. Jeanne lui passa une main sur la tête, enfonça un doigt dans la truffe du bon toutou. Louis fit partir l’animal, nettoya en hâte la robe de sa sœur. Va te laver les mains, vite ! ordonna-t-il. La petite gambada entre les pommiers, le poirier, le cerisier, les deux pruniers – ce n’est pas pour rien qu’on avait choisi d’appeler la maison Le Verger – elle pénétra à l’intérieur en évitant le salon où les invités du jeudi bavardaient, buvaient des tisanes ou du vin, mangeaient des tartes, raisinets ou mirabelles, évoquaient des affaires, locales ou internationales.

On félicita Fanny Yersin de ce que son fils avait été admis à travailler chez Louis pasteur. Une promotion hors pair, pérorait le médecin de famille, donnant sur pasteur des précisions qui traînaient au fond du premier cabinet médical venu. Une femme à la voix qu’on aurait dite passée au fumoir annonça qu’elle avait vu le chantier de cette fameuse Tour de 300 mètres que les parisiens s’étaient mis en tête de construire. Dans le salon des Soutter, comme par- tout ailleurs, la tour eut aussitôt ses partisans et ses opposants. Tant de métal tout de même ! Louis-Henry-Adolphe en profita pour dire que si Albert ferait comme lui des études de pharmacien, Louis songeait à l’ingénierie ou à l’architecture. Comme les discussions sur la tour échauffaient les esprits, Marie-Cécile vint clore le débat : l’homme peut bien bâtir une tour qui ne sert à rien s’il n’oublie pas de construire des temples et des cathédrales, témoins de sa piété et de sa grandeur. La maîtresse de mai- son avait souvent la parole qui pique. On évitait de trop s’y frotter. Son mari, de nature arrangeante, aimable, un peu lâche, acquiesça de façon visible, mais glissa dans l’oreille d’Albert ce qu’il aimait répéter à ses fils : si tu tombes entre les mains des pasteurs, tu ne fais rien de bon.

Louis-Henry-Adolphe connaissait le tempéra- ment de sa femme, il connaissait aussi la psychologie des clients qui passaient le seuil de sa pharmacie. De comprendre l’un et l’autre garantissait la paix du ménage, apportait des sous à la banque.

Les invités prirent place pour apprécier le moment musical et admirer ceux qui le proposaient : Marie-Cécile au piano, Louis au violon, Albert à la flûte, et la jeune Jeanne qui chantait avec sa mère, et parfois seule. On écoutait Tchaïkovski et Schubert en connaisseurs. On savait que si la musique demande certes du talent, elle exige d’abord du travail, de la persévérance, de l’acharnement, de l’humilité, autant de valeurs défendues âprement au Verger et loin à la ronde en ces terres nanties et protestantes. Plus encore que les garçons, les filles reçurent des vivats. Marie-Cécile, beauté austère, jouait avec cette grâce qui aurait permis aux plus imperméables de sentir naître en eux des émotions et qui rendait aux plus délicats le goût de la nuance. Et quand Jeanne chantait, c’était comme si elle avait oublié la présence des autres, comme si elle se trouvait seule au milieu des prés, entourée d’herbes folles et protectrices dans lesquelles on voudrait se rouler. Sitôt qu’elle devait s’arrêter, son visage se rebiffait, mais dès qu’elle reprenait son chant, on le voyait s’épanouir à nouveau. Avec des grandeurs bouleversantes, Jeanne offrait au ciel sa petite voix. En pariant qu’elle deviendrait cantatrice, personne n’aurait pris beaucoup de risques, mais qui aurait pu savoir que son besoin de liberté et son tempérament d’intrépide se briseraient contre les carcans de la morale ? Dans le destin des enfants Soutter, ce fut elle qui, la première, engloutie jour après jour sous les regards qu’on devine hypocrites et hostiles, lâchera définitivement prise. Les nages à contre- courant appellent la noyade.

Louis, plus que tout autre, aimait les réceptions au Verger : aucune tristesse, aucune crainte, une bienveillance générale qui laissait l’esprit s’assoupir, les inquiétudes se disperser. Si seulement ces moments à l’abri des sortilèges avaient pu s’éterniser. Pleine de vie, Jeanne était retournée à ses vagabondages, le jardin faisant office de monde, le frêne de forêt vierge.

Quand l’une ou l’autre avait été invitée, Louis osait s’approcher des jeunes filles à qui sa mère donnait des leçons de piano, flattées que leur professeure les distinguât. Du coin de l’œil, il regardait les chevilles et les poignets, devinait le reste. Un léger effroi traversait son corps. Albert, d’un naturel plus avenant, parlait avec assurance, n’avait lui besoin d’aucun déguisement pour s’affirmer. Par-dessus tout, Louis admirait sa mère, fier d’être son fils, il observait comment les hommes et les femmes la complimentaient, lui lançaient des paroles fleuries : des lys et des marguerites, des orchidées et des pâquerettes, et sur elle, même les chardons avaient des beautés. Louis s’en voulait de ne pas savoir mieux lui plaire. Il se souvint du dernier carnet de notes qu’il avait dû lui tendre au début de l’été. Marie-Cécile, d’un coup d’œil, avait tout enregistré. Elle aurait pu féliciter son fils, et pourquoi pas le serrer contre elle, l’embrasser, lui passer une main dans les cheveux. Louis ne figurait-il pas, comme elle le souhaitait, parmi les meilleurs élèves de la classe ?

Marie-Cécile s’était raidie, avait pointé la note de conduite, mauvaise, plus mauvaise encore que les fois précédentes, elle avait posé mille questions, des orties sur la langue, n’avait laissé à Louis le temps de rien. Mon fils a une mauvaise conduite, c’est toujours ainsi que le vent du désastre se met à souffler. Injuste et excessive, elle avait lancé ses pointes à l’aveugle, blessé quand il aurait fallu apaiser. Après les mots venait le silence, et après le silence quelque chose de pire que le silence. Marie-Cécile savait-elle que Louis restait le plus souvent à l’écart de ses cama- rades, comme vaincu par une sorte d’ennui inquiet  ? lui avait-on dit que dans le préau, si parfois il s’approchait d’un groupe, il se lassait vite de la présence des autres, partait s’asseoir dans un coin sans qu’on l’appelle, les élèves préférant oublier celui qui grip- pait les élans et décourageait la bonne humeur  ? se doutait-elle qu’en classe il n’était pas rare, à cause d’une sorte de rire, ou de cri, comme échappé de son corps, que tous les yeux se tournent vers son fils  ? De la tristesse et de la gêne, bien sûr que Louis en éprouvait. Combien de fois il aurait voulu se sauver, sauter à travers la fenêtre, courir jusqu’à la forêt et attendre la pluie pour se faire rincer jusqu’à l’os, renaître enfin, devenir autre ? Depuis l’arrière de la pièce, Marie-Cécile remarqua les plis sur le front de Louis. Elle lui lança un regard et le pria de ramener Jeanne avant que les invités ne s’en aillent.

En ce premier septembre de l’an 1887, tandis que Louis s’attristait de ne pas être aimé par sa mère autant qu’il l’aurait souhaité, à une petite centaine de kilomètres de là, Frédéric Louis Sauser, alors qu’il aurait préféré ne pas naître, sortait du ventre de la sienne. Cette femme triste et résignée, jamais il ne put l’aimer, et c’est sous un nom flambant comme un sou neuf qu’il écrira L’Or, la merveilleuse histoire du général August Suter, celui que dans la famille de Louis on appelait abusivement, mais avec tristesse et admiration, L’Oncle Suter, celui dont Blaise Cendrars deviendra le lucide porte-parole en racontant son apothéose et son apocalypse.

 

Juillet 1898

Madge, la belle Madge sortit de l’eau. Elle s’était trempé les jambes jusqu’aux genoux. C’était une rivière d’eau vive, poissonneuse. Madge avançait, ne craignait ni les galets ni la glissade, ni les roches ni le vent des montagnes. Sans perdre l’équilibre et sans rougir, elle ajusta sa robe. D’un souffle, elle éloigna une guêpe. Elle était solide Madge, et habile. Une vraie américaine. Elle s’approcha de Louis, l’embrassa, le serra contre sa poitrine, relâcha son étreinte. Dans le jour blanchi par le soleil, une serviette virevolta. Mes pieds mon chéri, il faut les essuyer ! elle ne cessait de sourire Madge, un sourire vigoureux, invariablement le même, comme ceux que l’on verra bientôt sur les publicités qui vantent l’hygiène buccale et les vertus de la pâte dentaire. Madge la moderne ! Madge l’américaine ! Louis enroba les pieds de la belle avec le linge de bain, les frotta, passa le tissu entre les orteils, admira ces morceaux de chair dodus et rosés. Madge enfila ensuite ses chaussettes et ses bottes en cuir. Elle regardait son homme avec fierté, comme on jauge une belle prise : Demain tu seras directeur, lui dit-elle la bouche grande ouverte, directeur du département des beaux-arts de Colorado Springs.

Sa voix rayonnait.
Sa poitrine gonflait.
Il y aura une fête, on ne parlera que de toi, de nous, de notre triomphe, on jouera un peu de Beethoven.

Louis n’avait que vingt-sept ans, le jeune couple la vie devant soi. Madge brassait les ingrédients de la réussite au fond de son grand chaudron étoilé. Elle ne vit pas la main que Louis tenait posée sur son ventre, ou sur son estomac, les pensées sombres qui partaient se cacher là. Depuis deux ans il acceptait les douleurs, les accueillait comme il pouvait. Surtout ne plus en parler à Madge : intestins et amour font mauvais ménage. Madge mordilla l’épaule de son homme, l’aurait préférée plus ronde, plus grasse. Entre deux rires, elle le lui dit.

Que d’événements depuis leur première rencontre au conservatoire royal de Bruxelles, lui, le chouchou d’Eugène Ysaÿe, le maître adulé, elle, talentueuse quand elle saisissait son archet, plus encore quand elle se mettait à chanter. Ces deux-là se plurent et se le dirent. Mais ce n’était plus sur un violon que Madge voulait que Louis pose ses doigts. Elle avait hâte d’autres enchantements. Comme Louis se montrait timide, on devine que ce fut elle qui se glissa dans la chambre, retira froufrous, dentelles et corset, elle encore qui pleine d’aplomb se glissa sous les draps, qui mit ses lèvres entrouvertes sur celles de Louis, baisa sa bouche, caressa ses jambes, son torse, son sexe, se frotta à lui, l’embrassa avec ferveur, s’empara de son être et se laissa transporter par ce qu’elle découvrait, lâchant quelques notes de bonheur, une partition inconnue qui s’écrivait au présent. Ils eurent un certain plaisir. Sur le visage de Madge, la mine légèrement hautaine qu’elle portait en permanence sur ce qui l’entourait avait disparu. Voilà donc ce qu’est l’amour, avait pensé Louis, partagé entre l’émerveillement et un indicible malaise. Oui, que d’événements depuis leur rencontre : Bruxelles qu’on avait quittée, Louis qui avait choisi de mettre de côté ses études musicales et de se former à Lausanne comme peintre, puis à Genève, puis à paris, suivant des ateliers académiques de bonne réputation. Madge n’empêchait rien. Elle taisait ses projets, cachait ses caprices. Tous les philtres ne sont pas instantanés. Quand le moment opportun fut arrivé, elle eut en bouche les bonnes paroles, emmena Louis jusque chez elle, dans sa patrie à elle, pour le marier dans sa ville à elle, non pas à New York ou à Chicago où l’on s’était arrêté quelques mois et où Louis, subjugué, serait bien resté, mais ici, à Colorado Springs, à côté du somptueux Garden of the Gods, avec l’ocre des rochers, avec le bleu du ciel, avec l’air sec qui vous sarcle les poumons. C’était là qu’ils érigeraient leur palais. On vivrait maintenant à l’heure du Colorado. Et le succès montrait déjà le bout de ses pinceaux, irait grandissant. Madge avait des parents fortunés, de l’ambition pour deux. We all love America, patrie de tous les possibles, berceau de tous les baptêmes. Je veux que tu deviennes illustre, disait Madge, je veux que nos amis nous envient, je veux que mes parents t’adorent, je veux que le département des beaux-arts étincelle, je veux que les étudiants t’admirent, je veux que les habitants de Colorado Springs nous reconnaissent dans la rue, je veux avoir des enfants de toi, je veux que tout cela soit immortel, je veux que tu dessines mon portrait ce soir, à la maison, quelque chose de simple à donner à mum pour la remercier des vêtements qu’elle nous a offerts. Louis hocha la tête : apparemment, pour le portrait, il voulait bien.

Dans sa main gauche, Louis tenait la gomme, et dans la droite le fusain. Pour ne pas bouger, Madge lisait, installée sur un fauteuil de velours jaune. Louis avait acquis beaucoup de sûreté dans son art. tandis qu’il dessinait avec aisance, marquait la lèvre supérieure, soulignait la courbe des sourcils, donnait vie au visage, l’orage éclata, pas un de ces pétards mouillés à l’européenne, mais un orage d’ici. Quand tout va bien, c’est six mille éclairs à l’heure. Louis se concentrait. Il fallait quelque chose de réa- liste et de délicat qui puisse satisfaire tout le monde, belle-famille en tête. La foudre ne perturbait pas Madge. Elle continuait sa lecture, exagérant à peine son abandon. Pour réussir le portrait attendu, Louis dut garder son sang-froid. Le résultat fut plaisant : l’âme de Madge se reflétait dans le dessin, mais pas trop. D’ailleurs Louis n’aurait pas vraiment pu dessiner autre chose, c’était là ce qu’il savait faire, ce qu’il avait appris, c’était pour cet art-là qu’on l’aimait et qu’on l’avait engagé. Pleine d’une joyeuse vanité, Madge était descendue dans l’appartement de ses parents, un étage plus bas, pour montrer le dessin à sa mère, tout de suite. Louis resta seul. Il déboutonna sa chemise en soie, massa son ventre, ou son estomac. Le vacarme de l’orage changeait de cap, roulait plus au sud. Louis aurait voulu dormir, ne penser à rien. Il devinait que l’art ne consistait pas à offrir aux gens de jolis dessins comme ce portrait, des babioles de bonne facture produites par quelqu’un qui n’y avait mis ni son cœur ni rien. Était-ce là le rôle de l’artiste ? À cet instant, son art, il aurait pu le dédaigner, le mépriser même. Mais à la place, il n’avait pas mieux à proposer. Jetons au loin ces mauvaises pensées, se dit-il, écoutons Madge et poursuivons le chemin ! Dans deux jours, ce sera la fête. Qu’adviennent la réussite et les jours de gloire ! et nul embarras !

 

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