Domaine français
Parution Sep 2024
ISBN 978-2-88907-398-6
160 pages
Format: 140x210 mm
Disponible

Domaine français
Disponible

Michel Layaz

Deux filles

Domaine français
Parution Sep 2024
ISBN 978-2-88907-398-6
160 pages
Format: 140x210 mm

Résumé

Après un long voyage en Asie, Olga, vingt-deux ans, rentre à Paris, accompagnée de Sélène, rencontrée dans un cimetière chinois. Quand les deux filles ne récoltent pas des légumes dans des fermes alternatives, elles remettent de la joie chez le père d’Olga, très seul depuis que sa femme l’a quitté. En surface, l’harmonie est totale. Mais plus le père observe Sélène, moins il peut taire le malaise qui monte en lui.

Les dessins miraculeux d’un homme sans domicile, un bouquetin sur un étroit chemin de montagne, une femme pâle dans un tea-room: dans ce roman aussi troublant qu’habile, on se met à voir des signes partout. En déjouant nos attentes, Michel Layaz interroge notre conception des liens familiaux et ce que veut dire donner la vie.

Auteur

Michel Layaz

Né à Fribourg en 1963, Michel Layaz fait partie des principaux auteurs romands contemporains. Commencée en 1993 avec Quartier Terre (L’Âge d’Homme), son œuvre littéraire compte aujourd’hui une quinzaine de romans, dont plusieurs primés. Parmi ceux-ci Ci-gisent (Zoé, 1998), écrit à la suite d’un séjour à l’Institut suisse de Rome, Les Larmes de ma mère (Zoé, 2003 ; Prix Dentan et prix des auditeurs de la Radio Suisse romande), ou encore la Joyeuse complainte de l’idiot (Zoé, 2004). Plus récemment, son texte Louis Soutter, probablement (2016) remporte un prix de littérature suisse, le prix Bibliomedia et le prix Régis de Courten; Sans Silke (2019), quant à lui, obtient le prix Rambert. En 2021 paraît Les Vies de Chevrolet.

Agenda

Sam. 22.2.2025 , 10h00

à la Bibliothèque sonore romande (Lausanne)

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Dans les médias

« Le récit central, c’est-à-dire l’accueil qu’un père fait à sa fille changée par un voyage et à sa compagne, édifie les thématiques principales : la question de la paternité et de la famille, celle de l’amour, celle de l’indépendance, mais aussi et principalement celle du hasard de notre naissance et de celui de notre mort, qui tend le roman entre deux pôles. Comme si de rien n’était, des récits subordonnés viennent nourrir ces thèmes.
(…)
Un suspense s’installe et martèle de doutes la fin de chaque court chapitre, nous maintient dans l’attente d’une révélation que nous craignons de concert avec le narrateur, sous-tend toutes les historiettes qui composent le roman.
(…)
Michel Layaz a su construire, dans un style parfois un peu exalté, parfois déroutant, un livre à forte tension narrative, dont la lecture résonne encore longtemps après en avoir refermé les pages. »

Une chronique de Melina Staubitz à lire ici

« Dans les livres de l’écrivain suisse Michel Layaz les phrases, courtes pour la plupart, semblent conduire chacune à une sorte d’évidence, d’immédiateté. (…) Sans effets de manche, sans artifices, elles semblent presque s’effacer devant ce qu’elles racontent, comme un plan de cinéma qui ferait oublier que ce que l’on voit est passé au filtre d’une caméra, de micros, d’un montage, d’une mise en scène.

Deux filles semble de prime abord appartenir au registre autobiographique tant la voix qui parle nous paraît proche et ce qu’elle raconte si immédiatement palpable. La voix est pourtant celle d’un cameraman documentariste que sa femme a quitté et qui vient accueillir à l’aéroport Olga sa fille unique partie sept mois en Asie pour échapper à la fadeur européenne.
(…)
On laissera le lecteur découvrir par lui-même où nichent les éléments de la tragédie. La fiction importe finalement assez peu. Elle n’est que le support d’un art du voir en quoi Layaz excelle. Voir la société où nous vivons, montrer la vie de cette génération dont on voudrait désespérer et qui apparaît ici tellement salvatrice. Voir les liens qui nous unissent et qui sont pourtant invisibles. Le roman s’appuie sur quelques scènes charnières, remarquables de netteté, fortes aussi en ce qu’elles ont de symboliques. Et si l’on est d’un monde d’après « les tempêtes et les abattoirs », d’après les offenses, ce roman-là nous indique une voie qui serait celle de l’apaisement. Pour croire encore en un monde meilleur. » Thierry Guichard

« De la rue de la Roquette, à Paris, au musée de l’Art brut, à Lausanne, l’étrange destin de deux amoureuses, d’un homme sans toit ni loi, dessinateur à ses heures, et d’un cinéaste deux fois père, sans le savoir. Sur lointain fonds de Chine, de pérégrinations entre Bourgogne et Lavaux, l’amour et la mort s’entremêlent. Avec délicatesse, Michel Layaz déroule le fil d’existences solidaires, particulièrement attachantes. » Jean-Pierre Pastori

« Il y a des romans qui commencent avec une certaine candeur, une apparente légèreté, pour finalement se révéler d’une grande profondeur. C’est le cas de Deux filles, un texte qui questionne la paternité, tout en nous offrant une très belle histoire d’amour. (…)

Au fil de la lecture, nous cherchons les signes et les indices en même temps que le narrateur. Nous comprenons alors qu’il y a quelque chose à découvrir, une vérité un peu différente. Le retournement de situation m’a beaucoup touchée. L’auteur aborde un thème rare en littérature, et terriblement délicat. Avec une histoire fictionnelle, il nous permet d’y réfléchir, de donner chair à un sujet important et compliqué. Un court mais dense roman qui reste en tête longtemps après sa lecture. »

Une chronique à lire ici

« Olga et Sélène, l’intellectuelle et la terrienne, la fille du narrateur et son amante. Quand sa fille revient de Chine pour habiter chez lui à Paris, un père raconte l’histoire d’amour de sa fille dans une ambiance qui vire à l’étrange. Une sorte de «déjà-vu» pour ce père témoin d’une histoire qui ne devrait pas être la sienne et qui le chiffonne de façon trouble. Un beau texte écrit dans une langue pure, déployé dans le paysage des évènements quotidiens, qui raconte les relations père-fille quand les enfants sont devenus grands. »

« Une réflexion sur la procréation médicalement assistée et sur ce que devenir père veut dire. Un texte qui ne donne aucune leçon mais qui médite sur la parentalité et l’amour, quelque soit la forme qu’ils peuvent prendre. »

Une chronique de Flore Delain, à lire ici

« Je vous ai peut-être déjà dit que j’appréciais l’écriture de Michel Layaz, mais il importe de le redire. Il fait partie de ces écrivains subtils dont on mesure les finesses parfois assez longtemps après les avoir lues. (…)
L’histoire est plausible, et même vraisemblable. Mais elle me semble surtout intéressante par le fait qu’elle se lit avec plaisir, comme si de rien n’était… Que c’est seulement peu après lecture qu’elle pose des questions. Non par rapport aux personnages mais par rapport à la société qui les engendre… »

Une chronique de Noé Gaillard à lire ici

« Foisonnant, lumineux, tendre et tragique, le nouveau roman de Michel Layaz tient le lecteur sous le charme de la plume élégante et discrète de son auteur. (…)

Débordantes de vie et d’humour, irradiant leur amour tout neuf, les deux jeunes femmes n’ont aucune peine à entraîner le père d’Olga dans leur tourbillon. Aucune ombre ne ternit le tableau et pourtant, plus le père observe Sélène, moins il peut occulter le malaise qui se développe en lui, la menace qu’il sent planer et dont la résolution va plonger le trio dans une forme de tragédie antique moderne. Sans effet de manche, sans pathos inutile, la conclusion ne peut que toucher au cœur. » Marie Nora

« Dans ce roman intrigant, Layaz multiplie les signes et les symboles, interrogeant subtilement les relations familiales, la maternité, et les liens qui nous unissent. Avec son écriture habile et troublante, il déjoue les attentes et pousse le lecteur à réfléchir à la nature de la vie et des relations humaines. »

Deux filles de Michel Layaz, élu « Livre du mois » par la rédaction du magazine Now Village, un article à lire ici

« Michel Layaz excelle à instiller l’étrangeté dans le quotidien. En apparence, Deux filles avance tranquillement, dans la joie de cet amour naissant, dans la découverte enthousiaste des cahiers de dessins d’un SDF, dans une escapade vers la Suisse et la Gruyère… Sauf qu’un malaise commence à poindre. Le lecteur le ressent peu à peu, en même temps que le narrateur. Qui est vraiment Sélène ? Sur un faux rythme habilement maîtrisé, l’écrivain vaudois nous emmène sur des voies inattendues. Et même si la révélation au cœur du roman semble assez improbable, il suscite un trouble étonnant et très séduisant. » Éric Bulliard

« Intitulé sobrement Deux filles, le roman de Michel Layaz ne compte que 160 pages, d’une écriture elle aussi sobre, dénuée d’artifices, au plus près de la narration. (…)

Roman d’un malaise, résolument contemporain, qui aborde les responsabilités de chacun, les conséquences d’actes a priori sans conséquences, roman d’amour aussi, un amour impossible qui sombrera dans la tragédie. Encore une facétie morbide du réel quand il décide, aveuglément, de vous prendre à la gorge…

Michel Layaz écrit une histoire forte, courte et puissante, qui ne laisse pas indifférent. Son éditeur dit qu’il fait partie des principaux auteurs suisses contemporains. Indéniable qu’il faut beaucoup de talent pour construire un récit a priori banal mais qui révèle bien des surprises. » Geneviève Senger

« (…) Soulignons le talent de l’écrivain, qui sème si finement le trouble. Freud parlait d’une «inquiétante étrangeté» pour désigner l’angoisse face à des réalités familières qui prennent tout à coup un visage insolite. Michel Layaz renverse en quelque sorte la perspective: Sélène est une inconnue qui va plonger le narrateur dans l’angoisse d’une inquiétante familiarité.
L’esprit du mal est absent de ce roman qui coule comme une eau limpide. Deux filles raconte un drame sans coupable (sinon les dieux du hasard jouant aux dés avec les destinées humaines). Tout baigne au contraire dans une lumière d’innocence, comme celle qu’irradient les dessins de Gédéon, artiste génial et SDF des bords de Seine. En tirant sur cet autre fil, le roman passe la frontière franco-suisse et mène à Lausanne. Il se termine à la Collection de l’art brut, où celui qui fut son premier directeur (Michel Thévoz) joue un petit rôle de guest star. » Michel Audétat

« Michel Layaz aime varier les registres, faire danser les mots, le style, le rythme. Il passe avec aisance de ville à campagne, de l’émotion à l’analyse, du monde cultivé à l’éloge de la nature. Son dernier roman, Deux filles, joue le jeu du double sens, et cache dans son titre le drame qui sourd dès les premiers chapitres.

Il faut pourtant s’habituer à la foulée de l’auteur. Parfois saccadé, parfois naturaliste, parfois lyrique, son style est riche, et par instants déroutant. Mais il sait dire les sentiments, l’humanité de ses personnages. Et il nous tient en haleine avec un secret qui ne nous sera révélé que très tard, aux effets dévastateurs. (…)

Le livre nous offre aussi de belles balades dans les rues, squares et parcs de Paris, une belle escapade en Gruyère au pied des Gastlosen, mais aussi des commentaires sur l’art, les artistes aimés par Olga, Warhol, Niki de Saint-Phalle, Le Caravage ou Berthe Morisot. (…)

Au final, on navigue entre tendresse et sensualité. Sentiments troubles. Ambiguïtés. Michel Layaz sait dérouler ses effets d’annonce, maintenir le suspense, nous faire aimer ces deux jeunes femmes si représentatives de leur génération. Et la fin nous bouleverse.

À vous de vous laisser emporter, je ne trahirai pas le secret ! »

Un article de Martine Béguin à lire ici

« Un père voit sa fille en aimer une autre et partage sa joie. Le dernier roman de Michel Layaz, aussi solaire que funèbre, creuse de manière inattendue le thème de la paternité. (…)

Olga et Sélène mordent tout à pleines dents, à commencer par l’art et la culture potagère. Elles travaillent dans des fermes alternatives et semblent vivre dans leur corps le bourgeonnement et les floraisons de la terre nourricière. Dans les rues de Paris, elles font aussi la connaissance d’un sans-abri, Gédéon, qui leur offre de superbes dessins de sa main, dessins «d’une simplicité divine, aussi étonnants qu’une fleur qui fleurit». (…)

Michel Layaz, qui enseigne la création littéraire, est très conscient des terrains qu’il explore. Il cherche à le faire de manière inédite. Il a voulu s’attacher à décrire les relations solaires entre un père et sa fille, à l’opposé de ce qu’il avait mis en scène dans Sans Silke, un précédent roman. Il aborde le thème de la PMA; celui de l’inceste également. On perçoit chez lui le souci aventureux de refléter l’époque contemporaine, les questions qui la traversent ou la déchirent. » Julien Burri

« Après la figure vrombissante de Louis dans Les vies de Chevrolet, Michel Layaz est de retour avec un récit plus intimiste, un beau roman à la fois joyeux et tragique qui fait la part belle aux sentiments. L’auteur vaudois, à qui l’on doit notamment Les larmes de ma mère, raconte cette fois une histoire du point de vue d’un père d’aujourd’hui, très complice avec sa fille. (…)
Dès la fin du premier chapitre cependant, une menace diffuse plane : « Qu’Olga, Sélène et moi n’aurions jamais dû nous rencontrer, qui aurait pu le savoir? »

On ne révélera pas ce que ce trouble annonce, si ce n’est qu’il découle des hasards de la vie, et d’un passé que le narrateur a totalement oublié, qui conduit à Lausanne. On dira juste qu’un drame pointe à l’horizon, qui surgira comme un coup de tonnerre dans le ciel bleu de ce bonheur si bien mis en mots, à l’aide de menus détails qui donnent à lire un quotidien transcendé par l’alchimie du duo féminin, par l’art, par les rencontres. Sans écarter la tristesse, le ton du roman reste profondément optimiste. L’énergie d’Olga et Sélène emporte comme un pas de danse et traverse ce livre à la fois tendre et poignant. Sans oublier des pointes d’humour, Michel Layaz peignant, par exemple, son narrateur en phobique des piscines dont la femme refait sa vie… avec un maître nageur. » Caroline Rieder

« Deux filles s’intéresse à un trinôme attachant, celui que forment le père d’Olga avec sa fille, et Sélène, jeune femme avec qui elle entretient une relation aussi inattendue que fusionnelle. »

Michel Layaz était l’invité d’Ellen Ichters et de Nicolas Julliard dans l’émission Quartier livre, à écouter ici

« J’aime bien dire que j’écris un livre contre le dernier, comme si chaque livre venait en réaction à celui qui le précède. »

« Après Les vies de Chevrolet, Michel Layaz revient avec un roman qui relate la passion de Deux filles. Olga part en Asie avec Mats et revient de son voyage avec Séléne. Son père accueille leur relation avec joie et bienveillance, jusqu’à ce qu’il commence à avoir des doutes sur la nouvelle venue. Et se dit que les trois n’auraient jamais dû se rencontrer. Un roman ambigu et troublant, surprenant. » Laurence de Coulon

« Olga a rencontré Sélène en Asie et follement éprise, rentre avec elle à Paris. D’abord très heureux, son père éprouve un malaise grandissant vis-à-vis de la compagne de sa fille qu’il peine à dissimuler, en particulier lorsque se pose la question de la maternité entre elles. »

« Quel joli roman, quelle belle écriture, incisive, précise, jamais démonstrative, toujours d’une précision juste. Un père retrouve sa fille adorée après une longue absence de plusieurs mois, elle revient après avoir rompu avec son petit copain mais accompagnée d’une jeune femme. Celle-ci semble avoir pris un rôle significatif dans la vie de l’enfant de cet homme un peu solitaire, pas complètement remis des douleurs du passés. Pour ne rien déflorer, restons-en là mais de grâce, lisez ce très beau roman. »

« C’est un court roman aux ingrédients très contemporains, une fiction faite de signes troublants, de pressentiments. Deux filles, c’est surtout l’histoire d’un père, un quinquagénaire qui retrouve son Olga, 22 ans, de retour de voyage. Elle était partie avec son compagnon, elle rentre avec Sélène, jeune maraîchère au gros caractère. À travers les yeux du père, on découvre une relation forte, mais où l’on jette de la lumière naît de l’ombre. Michel Layaz s’emploie à lever le voile, petit à petit, en abordant une des réflexions les plus profondes qui soit: que veut dire donner la vie? »

« Dans Deux Filles de Michel Layaz, sous la couche resplendissante de l’amour absolu entre deux jeunes femmes couve une menace indicible et un dilemme insoluble. (…)
Nous passons de Paris, décor romanesque iconique, à Lausanne, nettement moins présente dans la littérature. Berceau de la mécanique tragique qui irrigue le récit, Lausanne, son cadre géographique et humain, son Musée de l’Art brut et ses figures de proue, forment un contrepoint fortement caractérisé, décrits avec une jubilation manifeste par Michel Layaz. Pas de morale, ni de conclusion ou de leçon à tirer de ces Deux Filles et de leur destinée brisée. Juste une forme de tragédie moderne, que les Grecs nous envieraient sans doute. » Isabelle Carceles

« Au cœur du livre, il y a deux figures féminines qui jouent des coudes et vite occupent toute la place. À tel point qu’assez souvent le narrateur se contente de reconstruire le réel sur la base de ce qu’elles ont bien voulu lui raconter. Qui sont-elles ces deux filles ? D’où viennent-elles ? Écrire, c’est voler. »

Michel Layaz, sur l’écriture de Deux filles, à lire ici

Coups de cœur

« Un livre sur la parole, les non-dits, l’amour, la filiation avec des personnages authentiques qui pourraient être nous tous et chacun d’entre nous. Un livre à découvrir! » Maud

« Dans ce roman l’auteur pousse le lecteur dans ses retranchements pour l’interroger sur l’essence de nos rapports familiaux et amoureux. C’est troublant et réjouissant, libre et impertinent! Et on ne peut que penser à un autre roman de lui: Les deux sœurs. »

« Michel Layaz, avec sa plume délicate et précise, nous réjouit une nouvelle fois. » Stéphanie Roch

« J’ai adoré! Grand coup de cœur du libraire. »

« Quel trouble, on passe du bonheur pur à un sentiment de malaise inexplicable. Et tout cela s'ouvre petit à petit, et on craint pour les unes et pour les autres tant les personnages sont attachants. On a envie de les embrasser et parfois de les secouer! Et on les aime avec leurs défauts et leurs qualités. Et quelle fin…Une réflexion à la fois sur la fragilité et la force de l'amour, la fragilité et la force de la famille. » Christine Grivel

Extrait

L’avion venait d’atterrir. Dans les toilettes de l’aéroport, j’avais regardé mon visage. De l’eau froide et quelques claques sur les joues n’ont jamais fait de mal à personne. Va pour l’eau et les claques! Dans une demi-heure, j’embrasserai Olga, je serrerai ma fille unique contre mon corps. Sept mois ont passé. Parfois vite, et parfois lentement. Le temps des retrouvailles n’est pas moins simple que celui des séparations. Le départ d’Olga remontait à l’automne. Elle en avait marre: du savoir sans sortilèges de ses profs et du manque d’imprévu. Elle avait besoin d’un écart. D’un saut sur le côté. Ça m’avait surpris. Olga avait toujours aimé étudier, disserter, visiter des musées, aller au théâtre, sortir danser, elle participait aux luttes féministes, cherchait à être cohérente avec elle-même, se passionnait pour l’art contemporain, elle rencontrait des artistes et avait déjà écrit quelques textes pour des catalogues d’exposition. On la complimentait. Elle suivait sa voie. Rien de révolutionnaire. Elle le disait et en souriait. Une vie à sa mesure. Et là, brusquement, une force en elle avait réclamé du détachement. En découdre avec l’inconnu.

Pour sortir des rails, pas besoin d’intelligence, du courage suffit. Olga avait établi un itinéraire: Chine, Japon, Corée du Sud et Chine à nouveau. Elle avait tenu à m’inviter au restaurant. Sous l’oeil rieur de bouddhas aux ventres rebondis, on avait mangé thaïlandais, un lieu parfait pour échanger d’inutiles conseils et de pathétiques au revoir. Imaginer ma fille sur les routes d’Asie m’inquiétait, mais pas trop. J’avais confiance. Et puis elle ne partait pas seule, il y aurait Mats. Avec sa face de dandy sage, son corps frêle et ses mots posément
caustiques, Mats m’irritait un peu, mais il était le compagnon de ma fille et il avait de l’expérience. Durant trois ans, il avait travaillé comme éducateur auprès de toxicomanes marqués au fer rouge. À partir de son vécu profond et de ses observations, il avait écrit un bref roman au lexique cru et au souffle court. Quand il avait voulu connaître mon avis sur son livre, je m’étais réfugié dans des généralités.

Le retour d’Asie se ferait sans Mats. Dans la moiteur chinoise, le couple avait craqué. Je te raconterai, m’avait promis Olga. Ces deux derniers mois, au téléphone, un autre prénom revenait sans cesse, un prénom de fille, toujours le même: Sélène. Ma fille, elle si mesurée, s’emportait, elle inventait des formules, refaisait le monde avec Sélène, refaisait le monde pour Sélène, se moquait de ses propres mots, redevenait émue, éperdue, s’emportait à nouveau. Un vrai coup de foudre.

Les deux filles s’étaient rencontrées à Qufu, devant le tombeau de Confucius, dans le cimetière où cent mille de ses descendants sont enterrés. Je n’ai pas oublié. La voix d’Olga rayonnait dans mon ciel grisonnant, et puis ses paroles: On s’est vues, on s’est souri, et très vite il n’y a plus eu au monde qu’elle et moi. De Sélène, je ne savais presque rien: elle avait vingt-quatre ans, deux de plus qu’Olga, se peignait les ongles des pieds aux couleurs de l’arc-en-ciel, dormait peu, citait volontiers Confucius de bon matin, pouvait improviser un rap au milieu de la nuit, jeter des cacahuètes à la lune ou s’emballer devant les beautés d’un chou-rave.

J’étais impatient.
Revoir enfin ma fille.
Retrouver notre complicité.
Parler de ce qui nous importait et nous émouvait.
Contempler ensemble ce que personne d’autre ne voyait.

Les portes automatiques laissaient passer les voyageurs. Et soudain, le corps aimé a été là. Olga portait une robe d’un vert printanier. Sept mois de gargotes et d’hôtels médiocres n’avaient en rien terni son élégance. À deux pas d’elle, farfouillant dans un sac rose, une autre femme, blonde et plus petite, en short et crocs, a levé sur moi un oeil perçant. Tu sens bon, m’a dit Olga en m’embrassant. Ses premiers mots. Elle aussi sentait bon. Le visage enveloppé dans un sourire, elle a encore dit: Sélène, voici mon père; papa, voici Sélène. Sélène s’est approchée pour poser deux bises franches sur mes joues. Je n’ai eu aucun pressentiment. Ni bon, ni mauvais. Qu’Olga, Sélène et moi n’aurions jamais dû nous rencontrer, qui aurait pu le savoir?

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