Domaine français
Parution Oct 2021
ISBN 978-2-88927-914-2
168 pages
Format: 170x200 mm
Disponible

Pierre-François Mettan Postface: Jérôme Meizoz

Ella Maillart

Regards sur Chandolin

Domaine français
Parution Oct 2021
ISBN 978-2-88927-914-2
168 pages
Format: 170x200 mm

Pierre-François Mettan

Résumé

Juché à près de 2000 mètres dans les Alpes valaisannes, Chandolin devient la patrie d’élection d’Ella Maillart dès 1946, jusqu’à sa mort un demi-siècle plus tard. Les photographies rassemblées ici témoignent du regard émerveillé que l’exploratrice a posé au fil des décennies sur le village et ses habitants, sa vie religieuse et communautaire menacée par l’arrivée de la modernité. À travers des textes qui accompagnent ces images vibrantes, Ella Maillart raconte la construction de la route qui dès 1959 relie Chandolin à la vallée, déplore l’invasion des touristes, péril pour l’équilibre alpin, magnifie la montagne, sublime et dangereuse.
Ella Maillart ou la vie immédiate, texte hommage de Nicolas Bouvier, complète ce corpus, préfacé par Pierre-François Mettan, qui contextualise l’installation et la vie d’Ella à Chandolin, tandis que la postface de Jérôme Meizoz nuance le regard nostalgique de la photographe en révélant son arrière-plan: l’existence rude, le dénuement extrême de ces paysans montagnards.

Autrice

Ella Maillart

Ella Maillart (1903-1997) a été l’une des voyageuses les plus audacieuses de la première moitié du XXe siècle: navigatrice, figurante sur des plateaux de cinéma berlinois, aventurière dans les républiques soviétiques reculées, correspondante en Mandchourie, baroudeuse dans le Turkestan chinois, disciple de sages dans le Sud indien. Dès 1946, elle revient en Suisse et s’établit à Chandolin d’Anniviers où elle passe désormais six mois de l’année, « de la dernière à la première neige. »

Dans les médias

« La plume d’Ella Maillart rend compte des métamorphoses de Chandolin (la construction d’une route, l’arrivée des touristes…), du rapport à la nature (en particulier la flore, mais aussi la faune, avec les fameuses vaches d’Hérens), à la communauté et au village. La sobriété des images capturées par Ella Maillart fait écho à la limpidité des mots : on se prend à rêver devant une croix qui surplombe la vallée, un pin solitaire, une vieille femme au rouet… A rêver et à voyager. N’est-ce pas l’essentiel ? » Magali Bossi

« Au cœur de ce Valais si tibétain, dans le cirque des sommets dominé par le Cervin, [Ella Maillart] a documenté en textes et surtout en images ce quotidien à pic, fascinée par la frugalité et l’autonomie de ce mode de vie communautaire perché à l’orée du ciel.

Des photographies tentées par un exotisme du proche, mais qui «ont la même modestie descriptive que son écriture, la même attention à l’autre et à l’environnement», souligne Jérôme Meizoz dans sa postface à ces Regards sur Chandolin, escortés également d’un hommage signé Nicolas Bouvier. C’est une éternité laborieuse qu’elle saisit à même la pente, cherchant moins à la célébrer qu’à la retenir avant que la modernité ne gravisse, à son tour, la montagne sacrée. » Thierry Raboud

« Sous la plume d'Ella Maillart transparaît le regard qu'elle pose sur Chandolin, où dès 1946, après une existence d'aventurière, elle a vécu jusqu'à sa mort, un demi-siècle plus tard. À ses mots font écho les images qu'elle a prises des habitants, des traditions et des paysages de ce haut lieu du val d'Anniviers. Rassemblées ici, éclairées par des textes de l’auteure et d’autres écrivains, dont Nicolas Bouvier, ces photos en noir et blanc témoignent d'une époque pas si lointaine où les paysans de montagne étaient bien plus nombreux que les touristes dans ces alpages qu’aucune route ne reliait alors à la vallée. » Céline Prior

« Lorsqu'on a parcouru les endroits du monde les plus exaltants et inabordables, peut-on se satisfaire de Chandolin? Bien sûr, et ce portfolio en témoigne magistralement. Saisie par le regard curieux et empathique de l’aventurière, la vie du village anniviard isolé, modeste et austère, est aussi riche d'enseignements et de beautés qu'une lointaine équipée ethnographique. L'homme y trace durement son chemin, l'âme s’y accroche à la foi, et les yeux aux paysages sages ou grandioses…

Esthète, poète et documentaliste, Ella Maillart révèle à travers ses photos «bien plus que le Valais», comme l'exprime Nicolas Bouvier dans le bref essai qui accompagne ce bel album. »

« Navigatrice, aventurière, baroudeuse, correspondante, voyageuse et photographe, Ella Maillart n’a pas froid aux yeux. Et heureusement, car c’est à Chandolin, à deux mille mètres d’altitude, dans les Alpes valaisannes, qu’elle pose enfin ses bagages… Mais pas son appareil photo ! On retrouve dans ces pages les clichés pris dans sa montagne, qu’elle fait dialoguer avec ses écrits, où elle déplore l’arrivée de la modernité dans ce village qui l’avait tant séduite. Une histoire d’équilibre entre l’homme et les Alpes. »

« De ce val d’Anniviers, elle sera pendant presque cinquante ans une observatrice attentive, photographiant le quotidien immuable (semble-t-il) de ses voisins chandolinards : fêtes et rites, travaux des champs, vaches d’Hérens à l’alpage, paysages. Mais ses photos nous montrent aussi l’irruption de la modernité avec l’arrivée du premier car postal, en 1959, par la route tout juste construite. » Guillaume Lebaudy

« Un superbe livre illustré de ses nombreuses photos, avec un portrait-hommage par Nicolas Bouvier. » Thierry Clermont

Coups de cœur

« Un livre qui nous emporte très loin vers un temps où le monde était plus vaste et les yeux plus grands. » Hervé Guillaume

« Dès 1946, Ella Maillart s'installe dans le village de Chandolin, dans les Alpes valaisannes. Ce recueil de photographies et de textes rend hommage à la montagne, sublime et dangereuse, et aux modes de vie ancestraux de ses habitant-es. À cette époque, l'autrice déplore déjà l'invasion des touristes et appelle à protéger les paysages alpins. Un livre essentiel pour découvrir son oeuvre, célébrée en postface par un texte de Nicolas Bouvier. »
 

« Regards et paroles d'une des plus grandes exploratrices du XXème siècle sur le monde montagnard en mutation. Une évocation lucide et sublime d'un microcosme multiséculaire fragile menacé par la moderniét. Un document précieux ! » Alexis Lesage

« Avec la finesse et l'élan pour la vie qui lui sont propres, Ella Maillart dit toute la tendresse et l'apaisement qu'un lieu peut susciter. Textes et photos racontent le Chandolin des années 50-60, refuge de la voyageuse après des années de grandes aventures. » Julia Duroy

« Ella Maillart est dotée d'un sens pratique et d'un optimisme sidérant. Rien ne saurait l'arrêter et à la fin de cette lecture reste encore en suspens la question de ce qui meut cette femme et comment elle a pu à ce point échapper aux carcans de son époque. » Camille Alézier

« Un très bel ouvrage, émouvant et important pour qui veut en savoir plus sur Ella Maillart, pour découvrir un monde rural qui n'est plus, ou pour simplement s'émerveiller devant ces photos de sommets et d'alpages. »

Extrait

Ce beau nom qui chante c’est tout là-haut dans le ciel valaisan – à 1936 m d’altitude – une église blanche avec un carillon dans un village brun perché près d’une forêt de mélèzes. Jusqu’en 1959 on n’y arrivait qu’à pied en une heure depuis Saint-Luc. Le mulet n’allait pas plus vite. La route n’existait pas.

La vie de ces montagnards paysans est aussi rude qu’originale. Pendant l’été sec ils doivent irriguer leurs prés très raides au moyen de canaux ou bisses qui distribuent l’eau venue du torrent lointain. En juillet après avoir fauché l’herbe fleurie, Cyprien et Basile aussi bien que Philomène et Augustine ramènent sur leurs têtes des charges de fois de trente kilos tout en suivant d’étroits sentiers. Les enfants accompagnent partout leurs parents car ils n’ont d’école que pendant les six mois d’hiver.

Le climat est si sain que la viande séchée, le jambon et le grain se gardent indéfiniment dans les greniers. Ceux-ci sont caractéristiques; ils sont construits sur quatre piliers surmontés chacun d’une grande dalle plate destinée à barrer le chemin aux souris affamées. Dans le four à pain communal allumé une fois par mois, les paysans faisaient cuire leur fameux pain de seigle dur et noir. Mais aujourd’hui je vois que tout le monde achète le pain blanc venu par la poste de la boulangerie de Vissoie.

À vrai dire c’est la vache qui joue le rôle principal dans la vie des montagnards car ils ont l’habitude de manger du fromage à chaque repas.

Pendant l’été les bêtes sont toutes réunies à l’alpage où les pâtres font ces fromages succulents destinés à la raclette. En juin lors de l’inalpe, le premier jour où les vaches se rencontrent, elles s’affrontent et luttent pour voir qui est la reine, celle qui conduira le troupeau à chaque sortie.

En hiver chaque famille s’occupe de son bétail. Il faut parfois changer de mayen malgré la haute neige, lorsque tout le foin d’une grange-écurie a été mangé. Les ancêtres de ces vaches brunes du Valais ont été jadis amenés par l’envahisseur romain – qui succédait à des tribus celtiques. Le dialecte de la vallée est d’origine franco-provençale. En prévision du très long hiver riche en haute neige, il s’agit d’amonceler le bois de mélèze résineux qui brûlera dans le poêle en pierre ollaire qui garde bien la chaleur. C’est ce même bois fendu spécialement en plaques qui fournit les tavillons dont on fait la toiture si pittoresque des chalets.

Autrefois les Chandolinards pratiquaient beaucoup le nomadisme ou « remuage ». Ils déménageaient avec leur bétail afin d’utiliser le foin de hameaux éloignés (allant même jusqu’à Sierre où ils avaient aussi une maison familiale ainsi que du vignoble). Cette coutume se perd et aujourd’hui en cas de besoin on transporte les bêtes en camionnette. Tout change. Baignoires et machines à laver font partie d’une maison paysanne d’aujourd’hui.

Après la guerre les fils étaient partis travailler dans la plaine pour mieux gagner. Les vieux parents étaient restés seuls avec quelques vaches et l’on pouvait craindre le dépeuplement.

Mais la nouvelle route est terminée, des entrepreneurs de la vallée ont construit un nouvel hôtel, entouré de nouveaux chalets pour citadins, ainsi que le téléski de l’Illhorn qui monte à 2700 m. C’est le début d’un nouveau chapitre dans la vie d’un courageux village au cœur des Alpes.

1964
Texte écrit pour la Radio scolaire

pp.11-13

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