« Sans doute n’as-tu jamais été un enfant ». Cette phrase, la mère de celui qui parle ne l’a peut-être jamais prononcée, mais elle l’a dite avec son corps, avec ses yeux tristes. A partir de ces mots se dévide, en deux amples coulées sans point ni paragraphe, ce récit d’une enfance qui n’en a pas été une. Sa mère perpétuellement alitée, son père absent, le petit garçon est condamné à des responsabilités d’adulte, voué à la solitude et au silence. Un silence installé au centre de la table chaque fois que la famille est réunie pour un repas ; un silence aussi dur que les pierres que le père attaque à la dynamite dans les galeries où il travaille. Un silence auquel les voisins, l’injure mordante et la calomnie inventive, forcent cette famille étrangère. Mais un silence qui est aussi la seule chose que tous trois aient eu en commun.