Si Henriette, restée au service de Madame après la mort de Monsieur, est soumise et obéissante, elle sait aussi défendre sa position avec une véhémence où se mêlent révolte, finauderie et résignation. Comment dès lors le jeune protégé de Madame pourrait-il être perçu autrement que comme un intrus dans ce cadre étouffant certes, mais bien balisé, où le pouvoir ne s’exerce pas seulement du côté que l’on croit ?
Contrairement au Pain de silence (1999), où la parole ne parvenait pas à prendre durablement le pas sur le silence, le monologue ne cesse ici de gagner en force, se faisant toujours plus tendu et menaçant. Un véritable acte d’accusation. Une parole qui se libère à défaut de pouvoir s’affranchir.
Dans ce dernier texte achevé peu avant sa mort, et confié à son éditrice dans sa dernière lettre, Pasquali renoue avec les thèmes qui ont nourri toute son œuvre, mais revus et corrigés, non sans drôlerie, par Henriette. N’est-elle pas elle aussi, avec son parler populaire et maladroit, sa situation sociale, une sorte d’étrangère parmi les siens ?