Domaine français
Parution Août 2014
ISBN 978-2-88182-925-3
320 pages
Format: 140 x 210 mm
Disponible

Domaine français
Disponible

Poche
Parution Mar 2019
ISBN 978-2-88927-650-9
384 pages
Format: 105x165 mm
Disponible

Noëlle Revaz

L’infini livre

Domaine français
Parution Août 2014
ISBN 978-2-88182-925-3
320 pages
Format: 140 x 210 mm

Domaine français
Parution Mar 2019
ISBN 978-2-88927-650-9
384 pages
Format: 105x165 mm

Résumé

Jenna et Joanna, deux écrivaines à succès, mènent une vie tranquille entre leurs familles et les plateaux de télévision. Dans le monde simplifié qui est le leur, les livres sont devenus de banals objets, dont la valeur et l’intérêt s’arrêtent à la couverture. Présentateur, acheteur ou écrivain, plus personne ne songe à les ouvrir. Le geste est tombé dans l’oubli. Mais cette simplification va plus loin et s’étend à tous les domaines de la vie. La musique est un objet. Les enfants peuvent être des autocollants. Les amis ne sont plus qu’un mot. Il n’y a plus de for intérieur.
Satire du monde du livre ou fable hyperréaliste, ce roman est avant tout une réflexion sur les façons que nous avons de vivre aujourd’hui. Dans cet univers confiné aux accents futuristes on progresse entre inquiétude et rire, pour s’apercevoir enfin que c’est de notre quotidien qu’il s’agit.
Roman à l’implacable logique, L’infini livre est porté par une profonde ironie.

 

 

Autrice

Noëlle Revaz

En 2002, Gallimard publie Rapport aux bêtes de Noëlle Revaz. L’écriture de styliste de cette jeune auteur délicate fait couler beaucoup d’encre. Elle imite le parler des paysans comme peu y sont parvenus après Ramuz, elle est d’une finesse extrême. Il lui faut 7 ans pour sortir son deuxième livre, toujours chez Gallimard Efina, roman d’amour ironique et ciselé dont la presse française s’empare. Née en Valais en 1968, Noëlle Revaz vit à Bienne.

Dans les médias

« Dans un univers fait d’écrans et d’algorithmes, la musique est un objet, les enfants peuvent même être des autocollants. Et c’est légèrement flippant. Car plus personne ne pense à s’intéresser aux livres. A s’y plonger avec plaisir et passion. Mais Jenna et Joanna, deux écrivaines à succès qui mènent leurs vies entre familles et plateaux de télévision, entendent bien y remédier. » Fabio Bonavita

« Noëlle Revaz imagine dans L’Infini livre, (…) que les livres ne seront tout simplement plus ouverts, devenus de banals objets dont la valeur et l’intérêt s’arrêtent à leur couverture. (…) Un univers « parfait », qui contient bien évidemment des failles. L’occasion pour l’auteur de lister les huit commandements du livre, et notamment que « les livres sont libres » ou qu’« un livre est profondément agissant. » Un rappel salutaire. » Jacques Lindecker

A l'occasion de la sortie de son troisième roman, « L'Infini livre », Noëlle Revaz est invitée sur le plateau du 12:45. 

« Satire de la socitété du spectacle (…), L'Infini Livre se moque avec allégresse de la comédie du marketing régissant la vie littéraire. (…) Dans ce roman sur l'écriture et la littérature vivantes, profond comme un puits, vigoureux et neuf, la vacuité des apparences n'est pas irrémédiable. Rythme, mots et musique n'ont pas abdiqué leurs pouvoirs. Tout n'est pas dit. » (Jérôme Meizoz)

« Une parabole doucement acide, qui ne concerne pas seulement la littérature, mais jette un éclairage effrayant sur les mots, les rapports entre les hommes (…). » 

« (…) un roman aux personnages désincarnés et stéréotypés, à l'ironie mordante et à l'écriture simple mais inventive (…). Le dernier roman de Noëlle Revaz, après l'oralité âpre de  »Rapport aux bêtes« , a un peu la froideur d' »Efina« , et parle du danger de s'arrêter aux apparences. » (Laurence de Coulon)

« (…) Dans L'Infini livre, Noëlle Revaz pousse à l'extrême, avec une cinglante ironie, le portait d'une société superficielle et hypermédiatisée: féroce critique des médias et du milieu littéraire, le troisième roman de l'auteur valaisanne prend des accents orwelliens pour dépeindre un univers en deux dimensions, où l'être humain est privé de for intérieur et tributaire d'une série de normes absurdes. (…) elle invente à nouveau une langue et un style en accord avec son propos. Ici ses phrases sont brèves, factuelles, et sa sombre utopie se conjugue à l'imparfait. Temps de la répétition et de la description, il porte l'intrigue d'un bout à l'autre – une gageure – et instaure une distance fondamentale avec les personnages, reflet de leur impossible accès à eux-mêmes. (…)

L'auteure fait preuve d'une folle fantaisie pour donner vie à un monde simplifié jusqu'à l'étrangeté. (…)

Noëlle Revaz réussit ainsi à nous faire ressentir cet absolu éloignement de soi et l'inanité d'un certain jeu social. (…) » (Anne Pitteloud)

« C'est un livre dans lequel on entre en écarquillant les yeux. Tout est proche et étrange à la fois. Ce pourrait être nous dans une trentaine d'années? Ou dans dix ans? A moins que le roman d'anticipation ne soit en fait une satire du présent. Les deux à la fois, sans doute. (…)

Noëlle Revaz déploie, avec la luxuriance d'une tapissière, des attitudes, des codes, des inventions, des habitudes de vie qui pourraient voir le jour. (…)

Pour évoquer un monde dénué d'ombres et d'intériorité, Noëlle Revaz a choisi une écriture pleins feux qui dit sans discontinuer ce qui est ou ce qui était puisque tout le livre se déroule à l'imparfait, un temps qui impose la fable et qui renforce encore l'ironie. (…) » (Lisbeth Koutchoumoff)

Que vont devenir les livres? En cette rentrée littéraire, Noëlle Revaz répond à la question par un roman d’anticipation. Dans le monde qui nous est révélé, plus personne ne songe à lire des livres qui pourtant continuent de paraître, ou plus exactement d’apparaître, et d’être achetés. Leur contenu reste un mystère qu’il serait indécent voire dangereux de pénétrer et, sur les plateaux de télévision, seuls les couvertures et le poids des ouvrages sont discutés.

Les héroïnes de ce roman, auteures à succès de livres dont elles ignorent tout –ils sont rédigés par des algorithmes-, se plient sans rechigner aux lois de cette société déshumanisée où les amis sont choisis sur catalogue et où des stickers souriants et sages peuvent remplacer les enfants de chair et d’os au sein des familles.

Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où Jenna et Joanna décident, ensemble, de redevenir maîtres de leur écriture, semant ainsi la tempête autour d’elles.

Après Rapport aux bêtes et Efina, la rare Noëlle Revaz nous surprend encore une fois avec ce troisième roman, autant par le thème que par le style choisis.

 

« (…) Satire de la société du spectacle (à la façon Guy Debord, on porte sur elle un regard acéré), L’Infini Livre se moque avec allégresse de la comédie du marketing régissant la vie littéraire (…). Dans ce régime de notoriété télévisuelle, le langage et la communication sont standardisés, voire détruits. Pour en rendre compte, Noëlle Revaz invente un nouveau style, à la fois mécanique (contaminé par le langage tout-médiatique), sciemment artificiel et désopilant (avec un véritable talent d’ironiste) imparfaits narratifs, participes présents surabondants, fausses naïvetés. La langue du récit instaure une inquiétante étrangeté, drôle et pathétique à la fois. Cette création stylistique est parfaitement ajustée au propos. Elle rappelle parfois Thomas Bernhard, Kafka, Queneau voire Jean-Marc Lovay. (…) Dans ce roman sur l’écriture et la littérature vivantes, profond comme un puits, vigoureux et neuf, la vacuité des apparences n’est pas irrémédiable. Rythme, mots et musique n’ont pas abdiqué leurs pouvoirs. Tout n’est pas dit. » Jérôme Meizoz

« (…) Une fable qui insinue en nous de troublantes questions sur aujourd’hui. » Pierre Maury

« (…) D’une sombre ironie, le nouveau roman de Noëlle Revaz fait de la littérature, de la peopolisation imbécile des auteurs et de la commercialisation de la culture une allégorie efficace de notre mode de vie en perte d’humanité et, plus grave, de bon sens. Redoutable, ce livre infini ! »

« (…) Le plaisir qu’on prend à la lecture du roman de Noëlle Revaz vient à la fois de la rigueur avec laquelle elle développe ce qui n’est que l’extrapolation des tendances actuelles (la musique y est affectée des mêmes maux), et de l’inventivité dont elle fait preuve pour trouver, si c’est possible, une issue. Noëlle Revaz construit avec légèreté et ironie un monde aimable, policé et effrayant. On s’y plongera avec délices, inquiétude, et, qui sait, espoir. » Alain Nicolas

« (…) C’est, vous l’avez compris, une satire de l’univers du livre (auteurs et maisons d’édition) que décrit Noëlle Rivaz, une critique pleine d’un humour acide qui met le doigt sur nos différents comportements. Une lecture ironique, mais parfois bien réaliste de notre façon d’être dans l’apparence des choses (enfants autocollants mis aux fenêtres) et des relations (amis qui ne sont que des mots sur un écran ou parrainage d’individus obligatoire). (…) » Sylvie Génot

« Chaque livre de Noëlle Revaz a un côté qui sort de l’ordinaire littéraire, pose une nouvelle question, introduit un léger malaise. (…) Arrive le troisième roman, L’infini livre, on l’emmène au lit, à la plage, dans un wagon de chemin de fer, on s’y plonge, captivé, avec le sentiment d’avoir découvert encore un monde complètement autre, une écriture différente des deux premières. A chaque fois Noëlle Revaz réinvente un genre. Après le roman dit paysan et le roman dit d’amour, voici le roman dit de science-fiction. (…) Une fois encore, ce roman renouvelle le genre auquel il feint d’appartenir. S’il fallait situer ce livre dans la tradition littéraire européenne, on pourrait dire qu’il y a là un curieux croisement entre la froideur désespérée, presque cynique, de Michel Houellebecq et la tendresse hébétée de Robert Walser. (…) Chez Noëlle Revaz, même grincement, même impression d’être immergé dans un monde contemporain dont l’éternel présent est dit sur un mode qui le rend obsolète avant même d’avoir été vécu. Et juste au moment où elle semble en faire trop dans le pastiche, s’élève une voix fraîche qui ravit le lecteur: l’art de toucher à tous les genres pour les renier, les subvertir à chaque nouvelle phrase. Ça nous empêche de nous endormir sur une littérature de consolation courante. » Daniel de Roulet

Coups de cœur

« Satire du monde du livre ou fable hyperréaliste, ce roman est avant tout une réflexion sur les façons que nous avons de vivre aujourd’hui. Dans cet univers confiné aux accents futuristes on progresse entre inquiétude et rire, pour s’apercevoir enfin que c’est de notre quotidien qu’il s’agit. »

Droits vendus

Allemand
Acquéreur Wallstein Verlag
Année 2015

Extrait

1.

 

Le 3 janvier, le troisième livre de la romancière Jenna Fortuni était apparu. L’heure de l’apparition était difficile à déterminer, l’éditeur selon la coutume ayant tenu à garder le secret le plus longtemps qu’il était possible. Mais, d’un seul coup, au milieu de la matinée, le livre avait poussé par milliers dans les vitrines. Il fleurissait en pyramides aux caisses des supermarchés. Il était sur les présentoirs. Des grappes de livres s’amoncelaient aux rayons Loisirs. Il était vu dans les magasins et bien sûr on le découvrait en train d’orner les sacs d’un nombre croissant d’acheteurs dans les bus et les transports publics.

Le livre était identifiable sur-le-champ, grâce à sa couverture travaillée où dominaient les rouges. Sa surface offrait plusieurs niveaux de reliefs, sur lesquels le doigt pouvait voyager. L’un de ces reliefs avait l’aspect de l’étain ou du plomb. Le fond réel de la couverture était lisse. Dans certains creux, vers la droite, des rouges allaient sur l’orange. Dans d’autres creux, des mini lacs de couleur argent lançaient de petits miroirs où l’on pouvait voir ses yeux. Le motif le plus certain était le serpent à tête carrée s’avançant à l’horizontale aux deux tiers de la couverture. Sa tête était schématique, mais ce n’était pas dérangeant, car de la sorte le serpent faisait clairement référence au serpent aztèque ou inca. Sur son dos courait une crête aux créneaux rectangulaires, inégaux, comme de la main d’un enfant. Certains cri- tiques parlaient déjà du Serpent de la Connaissance, d’autres, de l’Arbre de Vie. Le nom de l’auteure était sensible en relief, à côté du nom de l’éditeur. Ces deux noms cependant ne pouvaient pas être confondus, si grandes étant l’habitude et la connaissance du marché que les acheteurs d’instinct savaient les départager.

Pivoté d’un quart de cercle, le livre présentait son dos. Le dos constituait une transition entre l’avant et l’arrière. Lui aussi était ouvragé, mais d’une façon plus modeste qui ne laissait pas de doute sur la surface à admirer. Quatre motifs stylisés, de haut en bas, s’y succédaient. Du dos, on pouvait poursuivre et arriver à l’arrière du livre, la quatrième de couverture. Elle était dorée, enluminée de blanc, vert, pourpre, vermillon. Elle portait les mots : Captivation, Confondant, Livre, Sublime, Beau, dont on sentait immédiatement qu’ils allaient faire couler beaucoup de salive. Les noms de plusieurs grands animateurs de télévision y étaient gravés. Ces textes étaient placés sur le haut. Les deux tiers au-dessous étaient vides. Une matière dorée brillante, sans toutefois aveugler, recouvrait cette surface.

La tranche du livre, enfin, était compacte et serrée. Le livre devait sûrement comporter de nombreuses pages. Son signet aussi était doré. Il faisait une fourche qui dépassait de la tranche, d’environ quatre centimètres. La couleur de ce signet évoluait à chaque tirage. La romancière à l’origine de ce beau livre était l’auteure :

Jenna Fortuni

Cette romancière avait déjà été en grande partie découverte par la critique. Dans le passé, elle avait bien vendu, et on pouvait déjà s’attendre à encore plus de succès.

2.

Le livre à son apparition était fêté. Le vernissage était transmis en direct. L’événement avait lieu au musée de la Reliure, dont il fallait gravir les vieux et charmants petits escaliers. Une des salles principales était réservée pour la fête. Elle bourdonnait comme une ruche. La romancière Jenna Fortuni, radieuse, déambulait, un verre de crémant à la main, au centre d’un panel d’amis. Les caméras faisaient des zooms. Elles rendaient compte du succès.

La couverture du livre de Jenna Fortuni était projetée artistement sur les quatre murs. Le livre était aussi présent sur les tables, en centaines d’exemplaires disséminés parmi les feuilletés du buffet. Les amis et admirateurs venus en nombre le saisissaient dans leurs mains. Ils y laissaient des empreintes qui étaient prestement essuyées par des assistantes engagées en extra.

Un des invités, un monsieur à lunettes d’une soixantaine d’années, se mettait soudain tout haut à expliquer qu’un objet aussi répandu qu’un livre était en soi un objet magique. Étant un, et étant à la fois des milliers. Pouvant à la fois être unique et à la fois exister dans les magasins du monde entier. Et simultanément s’il vous plaît. Un livre possédait le don de se multiplier. Il possédait le don d’ubiquité, si souvent désiré par les humains. Le monsieur concluait sur la question : le vœu secret des humains n’était-il pas d’être livres ?

La foule d’un seul mouvement applaudissait. L’homme faisait quelques pas pour s’écarter et on réalisait peu à peu que ce qui avait été pris pour une allocution spontanée était le discours officiel récité par un comédien.

Jenna ne pouvait rien écouter. Elle n’était pas non plus en mesure de répondre aux questions de ses fidèles acheteurs. Il lui était demandé de rester debout devant un objectif et elle intervenait en direct dans une émission au Canada. Les invités derrière elle constituaient un décor parfait. Le sujet de la discussion était déterminé en direct. Jenna ce soir-là n’avait pas de chance, il s’agis- sait de parler des castors sauvages, et Jenna n’y connais- sait rien. Et elle ne pouvait pas consulter son écran : elle l’avait oublié dans son sac. Jenna parlait du sirop d’érable, espérant que les mots passeraient inaperçus derrière son visage.

L’émission s’achevait. Une assistante reprenait son micro cravate et Jenna Fortuni était emmenée en voiture vers un studio de télévision où elle rejoignait une émission qui avait déjà commencé. L’entrée en scène de Jenna avait l’air improvisée. Les animateurs l’accueillaient avec des exclamations, en faisant semblant de la gronder. Elle était toutefois remerciée pour sa présence.

Jenna s’installait à la place qu’on lui avait indiquée et examinait les invités. Le plateau de cette émission réunissait des écrivains et plusieurs stars. Comme il se devait, presque toutes étaient des stars piégées. Jenna Fortuni se disait qu’il devenait vraiment rare de rencontrer une star qui n’avait pas été piégée. Et quoi de plus normal? Être piégée, pour une star, était la consécration : la certitude d’en être une.

Étonnamment, une des stars présentes ne l’avait pourtant pas encore été. Il s’agissait d’un très jeune acteur à la peau blanche. Les deux animateurs étaient particulièrement assidus et empressés à son égard. Ils lui demandaient comment il pouvait se faire que l’acteur n’ait jamais été piégé. Ce jeune homme apparaissait depuis presque deux ans dans le circuit. Il était souvent vu sur les plateaux et pourtant personne n’avait pu dénicher la moindre preuve ou image qu’il ait pu tomber dans un piège. L’animatrice demandait au jeune acteur s’il n’essayait pas d’être une star sans en payer le vrai prix. L’autre animateur prédisait l’avenir: le jeune et joli acteur ne s’en tirerait pas comme cela. La totalité des stars était piégée, même les plus mythiques. Il y en avait même qu’on avait piégées de manière posthume en ressortant des clichés de jeunesse où une bonne partie de leur être était exposée, et évidemment sous le mauvais angle.

Jenna ne participait pas à ces échanges. En tant que romancière, elle n’avait pas à se faire de souci. Les romancières n’étaient pas piégées. Jenna estimait que c’était en raison des livres, qui constituaient des manières de paravents. Les acteurs en revanche se trouvaient tout de suite corps et visages en première ligne. Bien sûr, ces derniers temps un ou deux romanciers avaient aussi été piégés. Les confusions étaient inévitables, animateurs et téléspectateurs étant prompts à tout mélanger, et il pouvait se faire qu’un acteur soit pris pour un artiste, un artiste pour un écrivain ou un écrivain pour un spécialiste. Dans le fond ça ne changeait pas grand-chose. Il s’agissait toujours de gens aimables et bien habillés, dont tout le monde connais- sait le visage, le nom, la blessure secrète et la destination de vacances préférée.

À ce moment de ses pensées, Jenna était interpellée par l’animateur qui lui posait la question: quand apparaîtrait son prochain livre ? Jenna connaissait la réponse : son prochain livre était programmé dix-huit mois plus tard. L’animateur insistait: pouvait-on connaître aussi l’heure? Jenna disait que comme d’habitude cela devait demeurer confidentiel. L’animatrice entrant en jeu se permettait d’insister : Jenna pouvait-elle en faire la confidence aux fidèles téléspectateurs ? Jenna ennuyée s’inclinait: elle révélait que le livre serait publié au milieu de la matinée, à une minute finissant par 15. Les animateurs exultants concluaient, et le générique de fin commençait à se dérouler.

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