« N’en déplaise aux gardiens du temple, le miracle suisse tient moins à la préservation farouche d’une indépendance inaliénable qu’à la gestion habile et séculaire d’une appartenance au monde. Dans son livre La Suisse ou le génie de la dépendance, la journaliste Joëlle Kuntz, chroniqueuse au Temps, déconstruit le mythe d’un Sonderfall fécond parce qu’imperméable et propose un autre récit: le génie helvétique a toujours résidé dans la capacité du pays à négocier les termes de son autonomie.
Le serment de 1291? Une »prise de conscience de soi dans un environnement plus vaste« . L’ordre westphalien de 1648? Une »exemption de l’Empire« , avec son assentiment. 1815, le Congrès de Vienne et le Pacte fédéral? La naissance d’un Etat modeste, »placé sous la garantie des Puissances« . La Constitution de 1848? Une indépendance tributaire de »l’indisponibilité militaire« de nos voisins. Les charnières de l’histoire suisse sont autant de momens clés de réorganisation de sa dépendance, écrit l’auteure.
A l’heure de la résistance glorifiée aux pressions étrangères, son essai résonne comme un appel à faire de l’interdépendance un projet. Urgent et indispensable. » Alexis Favre