Le rire et la peur ont partie liée et régissent aussi bien l’univers sauvage – harde de cerfs, horde de loups – que la civilisation technicienne et urbaine dont Zurich, gorgée de secrets, est le modèle-
Dans ses récits, Franz Hohler joue avec le fantastique. L’insolite surgit dans le quotidien : l’Aigle Royal, par exemple, quitte les Alpes pour s’établir en pleine ville, précédant les cerfs, les loups, les ours et les vipères qui, elles, nichent dans les cassettes à journaux.
L’étrange habite le familier : un animal domestique d’une espèce peu connue et à l’odeur forte se révèle être le diable en personne.
Les objets ont leur vie propre : l’écharpe s’impose comme justicière et les tumeurs hébergent des populations entières.
Les forces magiques et les pouvoirs du rêve qui prévalent entraînent, selon un rythme progressif, une violence implacable.
Spectateur ou acteur, le conteur conduit ses récits, achevés ou probables, ludiques ou effrayants, avec une logique apocalyptique et sans promesse. La lucidité serait-elle au bout de la route : « … et moi je réfléchis, je me demande si tous ces événements ne sont que le début de quelque chose qui, à partir d’ici, va s’étendre irrésistiblement. »
En cette fin de millénaire, l’homme a peur, et Dieu rit.
D.J.