« Oh non, il n’y a rien… c’est plutôt moi qui change… car enfin… les courses comme d’habitude… le syndicat… Il porte le café chez maman… C’est plutôt moi… mon état. »
Élisa en était la quatrième marche de béton. Comme pour les autres elle racla la neige, la repoussa en un petit tas vers la gauche, elle brossa jusqu’à ce que le béton fût net. Alors elle s’agenouilla sur la marche nettoyée et attaqua la cinquième.
« Tiens, là, plus haut… encore. »
Elle tendit le buste, appuya sa main gauche en plein dans la neige et regarda la trace du soulier clouté. Il y eut une petite tension des muscles de son visage, comme si elle perdait un peu de souffle. « Cher petit cœur… » Elle n’avait pas parlé mais ses lèvres frémirent selon le rythme des mots.
Encore une marche de faite… là, comme cela… la grande plaque de neige repousser, c’est le plus agréable… et puis brosser… Et encore un nouveau tas… « Tous ces petits tas, je lui demanderai tout à l’heure de les enlever la pelle, oui… Et puis il prendra encore cet air-là… Ah ça, tout de même ! » Elle se retourna, s’assit sur une marche encore pleine de neige et resta là un moment, sa brosse la main. Elle le revit nettement, assis devant le feu, les jambes tendues, les pieds appuyés sur la porte du four ouvert, avec cet air nouveau de repu sommeillant. Une volonté demi endormie tirait sa tête en avant, en arrière, par petits mouvements saccadés ; puis brusquement il se redressait, s’agitait comme s’il s’ébrouait : il y avait quelque chose de fripé dans son joli visage et les veines de son front saillaient davantage. « Ah oui, je dirai : Si tu allais ramasser les tas avec la pelle ? et il dira : Ouf ! les tas, qu’est-ce que ça peut foutre… Et puis il aura cet air. Il… »