Domaine allemand
Parution Jan 1990
ISBN 978-2-88182-070-0
150 pages
Épuisé

Traduit de l'allemand par Antonin Moeri

Poche
Parution Juin 2017
ISBN 978-2-88927-396-6
70 pages
Format: 105x165mm
Disponible

Traduit de l'allemand par Antonin Moeri
Préface de Olivier Mannoni

Ludwig Hohl

Le Petit Cheval, et autres nouvelles

Domaine allemand
Parution Jan 1990
ISBN 978-2-88182-070-0
150 pages

Traduit de l'allemand par Antonin Moeri

Domaine allemand
Parution Juin 2017
ISBN 978-2-88927-396-6
70 pages
Format: 105x165mm

Traduit de l'allemand par Antonin Moeri
Préface de Olivier Mannoni

Résumé

Dans ces nouvelles écrites en France et en Autriche, on retrouve artistes fauchés, fantaisistes blêmes, prolétaires musclés ou fluets. Ludwig Hohl puise dans son expérience pour dépeindre la vie animée des faubourgs, s’incarnant en un promeneur solitaire aux inflexions walseriennes. Parfois, il vient s’échouer sur la berge d’un fleuve ou au bord de la mer. Dans ces moments d’intense contemplation que la présence ou le mouvement de l’eau fait naître, Hohl donne alors libre cours à une émotion et à un lyrisme d’autant plus fort qu’il contraste avec la dureté de la vie du miséreux des métropoles.

 

Auteur

Ludwig Hohl

Avant de venir s’établir à Genève en 1937, Ludwig Hohl (1904-1980), fils d’un pasteur et petit-fils d’un industriel, a vécu tour à tour à Paris, à Vienne et à La Haye. C’est au cœur des métropoles européennes qu’il s’est frotté à la misère matérielle et qu’il a bâti une œuvre rare, fulgurante et lucide. Parmi ces textes qui lui ont valu la reconnaissance de Max Frisch, Friedrich Dürrenmatt ou de Peter Handke, citons Die Notizen (1944), son livre majeur, et Ascension (1975), bref roman de montagne qui l’a occupé toute sa vie.

Dans les médias

« […] la prose [de Hohl est] elliptique et dense. […] [sa phrase] n’est pas au service de l’intrigue comme dans le roman, mais claque, irradie mystérieusement, fulgurante, à bout portant, avec ses effets de reprise et d’opposition. […] Hohl s’impose en maître du détail et de la gradation des émotions. […] [sa] prose [est] terriblement humaine […] ; les mots y ont leur vie propre, rayonnante, pénétrante ; ils fraient dans le commun du langage des voies singulières, et rappellent qu’une petite phrase peut avoir une grande portée. » Maxime Maillard

«  Hohl charge de sens les paysages, les figures, les scènes de rue ou les simples détails de la vie du monde, de sorte qu’ils acquièrent la densité métaphysique d’une parabole. Les textes sont courts, la prose est ciselée sans emphase, les phrases minutieusement ordonnées vers leur sens, tendues vers la vérité qu’elles cherchent à saisir, cet élan vital qui donne de l’âme aux choses.  » Graziella Taïeb

Extrait

Il faisait nuit depuis une heure déjà. Dans le tram, dans les rues, sur les affiches des cafés, partout résonnait une voix unique – que demain serait jour de fête, réveillon, Noël ! Et moi qui allais, quittant la ville, vers le petit village de pêcheurs isolé, où j’habitais seul, je ne célébrerais aucune fête. Je me tenais sur la plate-forme du tramway, parmi une foule de gens, dont pas un seul n’avait l’air triste. Et pourtant, malgré tout ce que je voyais, ne devait-il pas y avoir des gens affligés, même en ces jours ? N’était-il pas possible que, peut-être − dans une de ces grandes maisons silencieuses, loin des fenêtres − une personne soit justement en train de mourir ?

Terminus. Les lumières s’éteignirent, plus tôt que d’habitude, à ce qu’il me sembla ; les employés étaient sans doute plus pressés que de coutume. Avec les rares personnes qui avaient fait le voyage jusque dans ce quartier des plus périphériques, je sortis, d’un bond, à cause du froid… et parce qu’il devait en être ainsi. Pourtant, alors que les autres disparaissaient rapidement, je me mis en chemin avec hésitation, un long chemin… ; je le fis, parce qu’il devait en être ainsi. Après les dernières maisons − à mon sens, visiblement les dernières − la route menait à nouveau, montant légèrement et de manière presque inattendue, dans une région montagneuse. C’était presque un paysage de haute montagne : la lune brillait sur un monde rocheux et désolé, sa lumière blême donnait l’impression qu’il se transformait en glacier, et qu’il était deux fois plus escarpé. Silence et désolation régnaient, désolation totale, brusquement.

La route, sur laquelle se détachaient nettement quelques cailloux malgré la clarté générale, menait vers une combe peu profonde. Et tout à coup, la mer se tenait là. Elle était là, debout. Rien qu’une petite partie, juste de quoi remplir la courbe, mais se dressant, une paroi, formidablement sombre.

Bientôt je me trouverais vingt mètres au-dessus d’elle, séparé de la pente à pic par un petit mur, là où elle domine par sa plus grande surface. Et je marcherais, marcherais, toujours autour des criques et des côtes rocheuses, toujours entre la mer mugissante et la montagne pelée − jusqu’au moment où, après un dernier virage cachant une crique, apparaîtrait le petit village de pêcheurs avec sa vie mystérieuse. − Mais était-ce à nouveau de la vie ? Je ne verrais que les maisons de l’autre extrémité de la courbe. Là-bas, une lumière allumée, ou deux. Lueurs provenant de tristes lampes à pétrole, derrière les petites fenêtres des misérables huttes. Elles ne dispensaient ni chaleur, ni charme. La gigantesque nudité des rochers avait beaucoup plus de force ; tout comme la mer immense. Les rochers pareils à des tours ou à des palais semblaient d’ivoire, davantage encore que le jour ; et les îles bien plus encore des bateaux fantômes ; et maintenant, malgré la nuit, on voyait qu’aucune plante ne pouvait pousser sur la longue crête pierreuse, derrière les maisons. Les deux lumières n’étaient pas rassurantes, elles évoquaient plutôt les yeux vitreux et clairs d’un énorme loup. Où donc était le loup ? L’œil humain, trop faible, ne pouvait saisir les contours de son corps ; les lignes de l’horrible paysage, de l’autre côté du village, le constituaient ; s’il venait à s’étirer, l’œil saisirait alors ces lignes. Et ici, à l’autre bout de la courbe, au-dessus de la route, les contours tranchants comme de l’acier d’une rangée de cabanons absolument silencieux (ils n’étaient habités qu’en été), avec leurs toits au large auvent, mais d’un seul pan, que la lumière de la lune éclaire crûment : n’étaient-ils pas les dents dans la gueule ouverte d’un autre animal terrible, dont la masse monstrueuse demeurait là, sans bouger, menaçante ?

Du même auteur

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Ludwig Hohl (1904-1980), écrivain alémanique, a vécu à Genève dès 1937. Ce récit, dont la NZZ a publié un extrait en 1938 sous le titre « Étude sur la faim », décrit les affres et les visions d’Andreas W., un peintre réduit à la plus grande misère matérielle. Contre la…

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