Notre relation à l’espace nous révèle. Elle nous façonne aussi. Notre territoire est notre langage et donc notre monde.
Retrouve-t-on d’une époque à l’autre – de celle des Prophètes d’Israël à celle de notre Modernité en mutation – un faisceau substantiel de continuités ? L’interrogation se heurte aux non-dits et aux non-perçus de ceux qui nous ont précédés, et plus encore, dès lors que nous tentons de saisir les connivences anciennes, au poids de nos catégories présentes. Les « temps du territoire », c’est aussi la structure de notre relation temporelle à notre environnement spatial, à chaque époque – de la Suisse de Rousseau à celle d’Alleingang, de la France de Michelet à celle du tout-voiture. Les multiples rythmes forment les fils de chaîne ; chaque instant comme chaque période forte constituent les fils de trame – et définissent la singularité émergente des moments successifs.
La prise en compte du religieux dans la relation au territoire a été jusqu’à récemment marquée de suspicion. A tort et à raison. De là le double souci à la fois de réintroduire cette dimension essentielle du comportement profond des hommes, explicite naguère encore, rémanente aujourd’hui, et en même temps de se départir avec scrupule d’une approche qui glisserait du registre scientifique à un engagement de foi.
Les études ici regroupées ne s’ajustent pas comme pierres de taille au sein d’un édifice d’une seule pièce. Elles ne proposent qu’un gué. Cela ne remplace pas un pont. Mais si les pierres n’en sont pas glissantes, et si le lecteur a de bonnes jambes, le gué aide à franchir.