parution juin 2010
ISBN 978-2-88182-678-8
nb de pages 224
format du livre 105 x 165 mm
prix 12.00 CHF

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Pietro Boschetti

Les Suisses et les nazis. Le Rapport Bergier pour tous

résumé

 

Ce livre est un trait d’union. Le trait d’union qui manquait entre le grand public et les 11 000 pages des travaux de la commission Bergier sur la Suisse et la Seconde Guerre mondiale. De quoi rebuter les meilleures volontés ! Si bien que beaucoup en étaient restés aux comptes rendus des médias lors de la polémique sur la Suisse face au nazisme.

Grâce à Les Suisses et les nazis, chacun a désormais accès aux points principaux étudiés par les historiens : comment la Suisse s’est-elle comportée pendant la Seconde Guerre mondiale avec les réfugiés et avec les fonds placés dans les banques ? Que savait-on du sort qui attendait les Juifs refoulés aux frontières ? Quel rôle jouait la place financière suisse ? Qu’en était-il du transit ferroviaire et du travail forcé en Allemagne pour le compte d’entreprises suisses ?

Cet ouvrage livre enfin au grand public les réponses proposées par la Commission indépendante d’experts.

biographie

Pietro Boschetti est historien de formation et journaliste de profession. Il a notamment travaillé pour plusieurs médias romands, dont la Radio Télévision Suisse (RTS).

La Suisse et les nazis

« Des décennies après la fin de la guerre, la Suisse a dû, à l’instar d’autres pays, faire “un effort de mémoire ” afin de restituer une histoire dont elle n’est pas propriétaire. C’est sans doute une condition pour pouvoir l’assumer. »

La Conquête du pouvoir. Essai sur la montée de l'UDC

 

L’Union démocratique du centre (UDC) domine aujourd’hui la politique suisse. Comment ce parti, qui en 1975 encore n’attirait qu’un électeur sur dix, a-t-il pu devenir dès la fin des années 90 le numéro un incontesté ?

Ce livre propose une explication historique qui part de l’après-guerre. Car pour comprendre ce qui se passe dans les années 90 et suivantes, il faut d’abord s’immerger dans la fabuleuse époque connue sous le nom des « Trente Glorieuses ». L’économie était alors en plein boom, le filet social s’étoffait, la société de consommation s’épanouissait. En 1974, la crise du pétrole sonne la fin de cet âge d’or, durant lequel la concordance entre la droite et la gauche avait si bien fonctionné. Le système entre progressivement en crise. C’est le début des « Trente Calamiteuses ». L’UDC, l’ancien parti agrarien, saura en profiter pour s’imposer.

Ce livre détaille son étonnante montée en puissance. Grâce à la mise en perspective historique, on comprend mieux le développement politique, particulier à la Suisse, de ces vingt dernières années.

Entretiens avec Jean-François Bergier (2006, domaine français)

Entretiens avec Jean-François Bergier

 

Ancien président de la Commission Indépendante d’Experts Suisse – Seconde Guerre mondiale, Jean-François Bergier est aussi un historien dont l’œuvre publiée est vaste, appréciée en Suisse et à l’étranger.

Sous la forme d’une conversation, ce livre propose un témoignage sur la trajectoire, les choix, les passions d’une personnalité inscrite désormais dans l’histoire de notre pays. C’est aussi une réflexion vivante – et de « vive voix » – sur l’histoire, l’histoire de la Suisse dans l’Europe, la Suisse au cœur du massif alpin. C’est enfin un plaidoyer pour une histoire responsable, critique et ouverte, qui nous invite à une connaissance du passé débarrassée de ses mythologies persistantes, pour que s’ouvre enfin un nouveau, indispensable et attendu « travail de mémoire ».

 

Les Suisses et les nazis. Le Rapport Bergier pour tous: extrait

 

Introduction

 

Du traumatisme à l’introspection

 

 

La Commission Indépendante d’Experts Suisse – Seconde Guerre mondiale (CIE) a été instituée par l’arrêté fédéral du 13 décembre 1996. Adopté à l’unanimité par les deux Chambres du Parlement fédéral, cet arrêté fixe le mandat de la CIE et lui demande de faire toute la lumière sur l’étendue et le sort de ce qu’on a appelé les « fonds en déshérence ». À savoir, toutes les valeurs déposées dans les banques suisses ou confiées entre 1933 et 1945 à des fiduciaires, assurances ou autres gestionnaires de fortune par des victimes du nazisme et qui n’ont pas été récupérées après la guerre par les ayants droit. Sur la base de cet arrêté, le Conseil fédéral décide le 19 décembre d’étendre le champ des recherches à d’autres sujets aussi sensibles que la politique envers les réfugiés, les relations économiques et financières de la Suisse avec le Troisième Reich, la production et le commerce des armes, l’aryanisation des firmes juives, les transactions de la Banque nationale sur l’or allemand, le trafic des devises, des titres ou des œuvres d’art, le transit ferroviaire. La commission y ajoutera d’elle-même le problème, surgi plus tard, du travail forcé dans les filiales d’entreprises helvétiques en Allemagne. Le mandat défini par le Conseil fédéral englobait aussi la façon dont le pays s’était acquitté des restitutions dans l’après-guerre.

Autrement dit, à peu près toutes les questions importantes concernant les relations de la Suisse avec le national-socialisme (1933 à 1945) étaient posées. Ce programme englobait aussi les relations avec l’Italie fasciste ; et encore, pour permettre une mise en perspective objective, avec la France de Vichy, les Alliés, les autres pays neutres. Une tâche considérable et un « effort de mémoire » sans précédent dans l’histoire du pays, même s’il y avait déjà eu le rapport Ludwig sur la politique d’asile, en 1957 ; et celui de l’historien Edgar Bonjour sur la neutralité au début des années 1970. En revanche, ce vaste mandat n’incluait pas des problèmes tels que la défense nationale, la politique de neutralité, les activités humanitaires ou la vie quotidienne, qui sont abordés dans d’autres ouvrages. Il n’était donc pas question d’écrire une histoire exhaustive de la Suisse et des Suisses de 1933 à 1945. Il s’agissait d’examiner une série de questions bien définies mais encore mal connues.

Le Parlement a octroyé à la commission le privilège exceptionnel d’un accès illimité à toutes les archives publiques et privées, notamment celles des entreprises et des banques. Il a fallu, pour ces recherches, lever le secret bancaire. Pour la première fois, des historiens étaient amenés à exploiter les sources privées. Jusque-là, nul ne connaissait leur volume, leur éventuelle richesse. La commission a d’abord adressé un questionnaire à toutes les grandes entreprises concernées, c’est-à-dire actives à l’époque. Toutes y ont répondu, sauf Burrus SA à Lausanne. La masse de matériaux livrés aux chercheurs s’est révélée considérable, bien plus que prévue. Dans la plupart des cas, tout était à faire, à commencer par ôter la poussière recouvrant des piles de documents ; dans d’autres firmes, plus rares, les archives étaient conservées et classées de manière professionnelle. C’est pourquoi la commission a établi un budget qui fit porter au printemps de 1997 à 22 millions de francs le crédit d’abord évalué arbitrairement à seulement cinq millions. Enfin, le Conseil fédéral s’était engagé par avance à publier l’intégralité des résultats de la recherche. Gage de bonne volonté de la part du gouvernement et du parlement, la CIE a été dotée de moyens conséquents.

La Confédération engageait donc un sérieux travail d’introspection historique en mettant à disposition les moyens matériels et financiers nécessaires et en garantissant l’indépendance des chercheurs. Ce fut exemplaire et a été salué comme tel à l’étranger. Plus d’une vingtaine de pays ont à leur tour créé leur propre commission d’enquête sur la Seconde Guerre mondiale. Nombreuses furent celles qui se sont inspirées du modèle de la CIE, même si leur mandat était moins vaste ; il portait avant tout sur la question des spoliations et des restitutions.

La CIE voit le jour alors que l’opinion publique est secouée par toutes sortes de « révélations » concernant les fonds en déshérence dormant dans les coffres des banques suisses, le trafic de la Banque nationale avec l’or nazi ainsi que la politique d’asile de l’époque. On veut des réponses précises et instantanées, que les autorités sont bien en peine de fournir. La polémique prend une telle ampleur qu’au printemps de 1996 déjà, les banques ont mis en place avec le Congrès juif mondial un « Independent Committee of Eminent Persons », dit Comité Volcker (du nom de son président), chargé de repérer dans les comptes bancaires tous les fonds individuels en déshérence. Puis, à l’automne, le gouvernement organise une « Task Force » dirigée par le diplomate Thomas Borer, dont la mission est de calmer le jeu. De leur côté, la Banque nationale, les autres banques et les industries créent un fonds en faveur des victimes de l’holocauste. C’est dans ce contexte agité que naît la CIE.