parution août 2014
ISBN 978881829246
nb de pages 240
format du livre 105x165
prix 13.00 CHF

où trouver ce livre?

Rose-Marie Pagnard

Le Conservatoire d'amour

résumé

Deux sœurs adolescentes, bien que soumises à leur père, lui faussent compagnie et fuguent vers leur amour de la musique. Elles prennent alors leur flûte et disparaissent. Le chemin du Conservatoire est pavé d’épreuves singulières, mais rien n’arrête Gretel et Gretchen qui veulent être admises au paradis de la Musique.

Un roman, un conte, une histoire de passion pour la musique, une enquête-opéra qui revisite la Flûte enchantée. Rose-Marie Pagnard est l’auteur d’une œuvre aux pouvoirs subtils, dix romans et recueils de nouvelles dont Janice Winter et J’aime ce qui vacille.

 

 

biographie

Rose-Marie Pagnard a notamment publié La Période Fernandez (1988, Actes Sud, prix Dentan), Dans la forêt la mort s’amuse (1999, Actes Sud, prix Schiller), Janice Winter (2003, éditions du Rocher, Points Seuil), J’aime ce qui vacille, 2013, Zoé, Prix suisse de littérature).

Gloria Vynil (2021, domaine français)

Gloria Vynil

Porter en soi une amnésie comme une petite bombe meurtrière, avoir cinq frères dont un disparu, vivre chez une tante folle de romans : telle est la situation de Gloria, jeune photographe, quand elle tombe amoureuse d’Arthur, peintre hyperréaliste, et d’un Museum d’histoire naturelle abandonné. Dans une course contre le temps, Gloria et Arthur cherchent alors, chacun au moyen de son art, à capter ce qui peut l’être encore de ce monument avant sa démolition. Un défi à l’oubli, que partagent des personnages lumineux, tel le vieux taxidermiste qui confond les cheveux de Gloria et les queues de ses petits singes. Avec le sens du merveilleux et le vertige du premier amour, Gloria traverse comme en marchant sur l’eau cet été particulier.

Rose-Marie Pagnard jongle avec une profonde intelligence entre tragique et drôlerie pour nous parler de notre besoin d’amour.

Jours merveilleux au bord de l'ombre (2016, domaine français)

Jours merveilleux au bord de l'ombre

Dans une petite ville des années 60, Brun, génial garçon de treize ans et sa  petite soeur Dobbie ne supportent plus la réputation de voleur qui menace la vie de leur père. Une terrible injustice, d’autant plus que le voleur, le magistral escroc n’est autre que leur oncle Räuben Jakob, directeur d’une fabrique de feux d’artifice et astucieux bienfaiteur... Passant de leur misérable logis à la villa de leur oncle, Brun et Dobbie pourchassent une vérité qui ne cesse de s’esquiver; d’ailleurs, n’y a-t-il pas de multiples vérités?

Inventifs et solaires, ils charment tout une bande de partisans de la justice. Dobbie s’amourache de chacun, Brun tient des propos désabusés d’adulte plein d’expérience, tandis que le comte Mato Graf, le professeur de violon, le marchand de cristal, les frères Jakob et d’autres se laissent aller à des comportements puérils qui provoquent, chez le lecteur, un indéniable sentiment de danger.

J'aime ce qui vacille (2013, domaine français)

J'aime ce qui vacille

 

Comment les parents de la jeune Sofia retrouveront-ils la force de vivre après sa mort ? Illmar, le père, lance alors le projet d’un bal qui réunira tous les habitants de la tour où il vient d’emménager avec sa femme – comme si les vies apparemment ordinaires de leurs voisins allaient les aider à comprendre le drame de Sofia et peut-être les sauver des eaux noires du chagrin. Mais tel un reflet du monde, la tour se révèle être un empilement de vies vacillantes, de destins tous farouchement tendus vers la douceur et la joie intérieure. 

J'aime ce qui vacille a reçu le Prix suisse de littérature 2014

Laudatio de Marion Graf

J’aime ce qui vacille, le onzième roman de Rose-Marie Pagnard, mêle les genres et les tonalités avec une évidence toute musicale. C’est un roman et c’est un conte, ou même une comédie ; une fiction primesautière et ironique, et un poignant livre de deuil personnel; une plongée dans les eaux noires du chagrin et de la culpabilité, et une explosion de couleurs, de matières et de mots chatoyants.

Deux ans après la mort de leur fille, toxicomane, ses parents, Sigui et Ilmar, semblent s’éloigner l’un de l’autre, chacun se retranche dans son deuil, face au vide : elle dans ses errances, en quête d’une vérité impossible, lui dans ses rêves et son travail de costumier de théâtre. Alors s’engage ce roman grave et dansant, sur le tranchant de la solitude et de l’amour, de la douleur et de la fête, entre la vie et la mort, la lucidité et la folie qui guette. Peu à peu, dans les sept étages de la tour vacillante où vivent Sigui et Ilmar, les portes s’ouvrent sur d’autres personnages assez excentriques, naissent des solidarités, autour d’un projet saugrenu et peut-être salvateur.

La perspective est surtout celle de Sigui, le livre est rythmé par ses retours en arrière, somnambuliques ou réalistes, et par les sollicitations et les interactions du présent, par tout ce qui la dérange comme une violence faite à son deuil, et l’arrache à son jardin noir. Exclamations et questions sans réponse, bribes de dialogues, rencontres et tohu-bohu métamorphosent peu à peu son monde intérieur.

A l’heure où domine l’autofiction, Rose-Marie Pagnard recourt avec bonheur aux détours de l’art et de l’imaginaire pour affronter la réalité.

 

                                                                        Marion Graf

 

Ce qu'en dit l'auteur (texte paru dans la revue des belles-lettres, 2012, I):

"Entre elle et lui un contrat moral est signé. Il oublie sa signature. Elle oublie cette histoire. Elle et lui ne se reconnaissent pas dans l'ascenseur. Dans un fatras d'intentions le contrat se perd. Un contrat aux conditions particulièrement rudes pour elle comme pour lui qui préfèrent l'oublier, se sentir libres, libres, libres, et en bonne santé. C'est dans l'air du temps. Cependant. Cependant ici et là des contrats tout aussi rudes sont à la lettre respectés, dans toutes sortes de domaines, entre deux personnes, voire entre une personne et elle-même, mettons, entre un écrivain et lui-même. 

Plus je veillis, plus je suis consciente de cette étrange anticipation. Longtemps avant de tracer le premier mot d'un roman, ce symbolique contrat occupe mon esprit (c'est à la fois grave et excitant). D'une part je sais que je m'y mettrai, à ce roman, oui, la chose est entendue au plus profond; d'autre part je ne sais plus rien, je me sens dans mes petits souliers, un peu,  comme avant un mariage secret, radical (divorce interdit), aventureux, plein de responsabilités envers moi  seule quoi qu'il arrive (ce dernier point surtout me trouble).

Sur cette confidence absolument inutile au lecteur, je me permets une remarque utile à la vérité. J'ai quelquefois l'impression que l'art est considéré comme le sujet unique de mes romans. Or, c'est un sujet parmi les autres, un sujet que j'aime, mais qui ne saurait réduire, dans ces romans, la vie des personnages, la vie prosaïque, ou poétique, l'intrigue, le romanesque..." Rose-Marie Pagnard

Le Motif du rameau, et autres liens invisibles

Maman Reinhold, ex-cascadeuse convertie en protectrice de l’innocent et dangereux Leonard ; Ben Ambauen, écrivain et chasseur de lièvres ; la fille d’un marchand de vaisselle transformée en héroïne de conte ; Ennry Pinkas, juriste dont la petite taille cache une imprévisible folie ; un extravagant éditeur qui se croit « sans imagination » ; la ville de Bergue et Tokyo la mégalopole : le lien entre ces personnages et ces lieux s’appelle Ania.

Ania, fille adoptée, élève forcée du Foyer des enfants spéciaux, est devenue l’épouse d’Ennry. Elle incarne ici l’amour absolu, mais aussi l’incroyable aptitude qu’ont certains êtres à supporter les vicissitudes de leur destin.

Ce roman à l’écriture musicale et ardente est un éloge à la force de l’imagination. « J’essaie de me relever, mais je suis fatiguée d’entendre la réalité et le rêve penchés sur moi à plaider chacun pour son compte, en japonais ! » Mais voici que le hasard saute dans l’histoire…

Le Collectionneur d'illusions

 

Les trois récits de ce livre se répondent par le thème de l’art et grâce à leur personnage principal, Cornelius. Dans «Le collectionneur d’illusions», il raconte comment son père, après sa ruine, suit à la trace, en parfait illusionniste, sa collection d’œuvres d’art perdue dans des hôtels et des restaurants de luxe. «Figures surexposées» est une véritable allégorie surréaliste de l’inspiration et de la création artistiques. «Le violon de ma mère» fait la part belle au pouvoir imprévisible de l’imagination grâce à la mère de Cornelius, une vieille aveugle qui invente un monde invisible.

 

Postface de Doris Jakubec 

 

Le Conservatoire d'amour: extrait

Mon père ferma la porte du château et prit la tête de notre troupe sur le chemin conduisant au garage. À peine étions-nous sortis, qu’un brouillard anormal nous tomba dessus, aussi triste et pâle que le col de fourrure, lui aussi hors de saison, pendu au cou de ma mère. J’ai crié à mon père, que je tenais en douce par le bord de sa veste :

— On ferait mieux de rentrer, on ne voit déjà plus la maison, papa ! Qu’est-ce qui nous guette derrière ce brouillard très suspect, très suspect. Un rêve ? Un rêve affreux, j’en ai peur ! 

— La ferme  ! a répondu mon père. Et soigne ton langage, Gretel, cette manie que tu as de répéter les mots révèle ton manque de maturité autant que ton mauvais goût. Un rêve, ha, ha ! Mais tu ne risques pas d’en souffrir, toi, parce que depuis ta naissance tu vis dans un rêve. Ce qui complique notre existence, me fait souffrir, moi ! Un état regrettable qui concerne également ta petite sœur Gretchen, ton frère Hänsel en ce moment alité pour cause d’ébriété, votre mère Pelva. Vous tous. Comment un chef de famille peut-il faire obéir des rêveurs ? Il essaie… a gémi mon père d’une voix catastrophée. Par des discours, propos instructifs, promenades de luxe, coups et punitions… j’essaie, je me tue à la tâche !

À ces mots, ma sœur Gretchen, qui marchait sur mes talons, s’est arrêtée pile et de sa voix la plus enjôleuse elle a lancé à travers le brouillard notre ultime demande (il était convenu entre nous que si notre père refusait toujours de satisfaire cette demande, nous prendrions la fuite ce jour même, avec nos sacs déjà cachés entre les sièges de la voiture).

— Pauvre papa ! Mais n’oublie pas que Gretel et moi avons réussi notre bac, pour toi, pour la famille Gesualdo-Von Bock ! Et qu’un jour nous serons capables, heu… de jouer, ou faire jouer, une musique dédiée à nos chers parents si tu nous permets de nous inscrire au Conservatoire de musique, un Conservatoire que tu dois connaître puisque Hänsel y va comme chez lui, à ta grande rage, c’est vrai, mais Gretel et moi nous ne voulons rien savoir de cette rage, nous voulons que tu acceptes notre choix : études au Conservatoire, l’ancien, le célèbre, en ville, celui dont le nom est si souvent écrit sur les disques de maman que nous avons l’impression qu’il fait partie de la famille. Alors, réponds, papa, maintenant !

Mon père et ma mère éclatèrent d’un rire, d’un rire complice qui nous enlaça, nous enlaça brusquement et nous fit glisser impuissantes jusqu’au garage.

Les portes de notre nouvelle voiture à cinq places se sont refermées sans bruit, laissant se répandre la voix subitement réjouie de mon père.

— Les filles, installez-vous et goûtez le moelleux de ce cuir et la souplesse et le silence de cet engin ! En temps voulu je répondrai à ta question, Gretchen, c’est-à-dire au cours de notre promenade dominicale qui inspirera, je l’espère, ma conscience paternelle ainsi que l’esprit toujours péniblement long à s’éveiller de votre mère ici mentalement absente.

— J’aime cette voiture, Emilio, dit ma mère, je l’adore et je pourrais y vivre. Vendons le château et vivons ici !

— Combien de cachets as-tu avalés, Pelva ? Tu dérailles au lieu de montrer l’exemple de la sobriété en toutes choses à nos enfants, au lieu de travailler pour les nourrir. À propos, avez-vous mangé, là derrière ?

En chœur nous avons répondu oui, très bien, très bien. La nourriture, dans notre famille, dépend des caprices de ma mère et des caprices de la Finance (comme notre père désigne son actionnaire principal et secret) : brioches, ravioles aux truffes, langues-de-chat en bottes feuilletées et autres délices pendant des jours, puis carottes aux carottes, ou pain dur pendant des jours. Quand nous avons de quoi remplir nos estomacs, ma mère parle beaucoup des métiers qu’elle pourrait, d’une seule pichenette de sa volonté, exercer à des tarifs princiers, mais il paraît que mon père n’aimerait pas que son épouse abandonne le château… Quand nous crevons de faim, ma mère s’en prend à Hänsel, notre frère aîné que je vous présenterai plus tard, vu qu’il est en ce moment étendu sur son lit ou en train de marcher et de réfléchir en paix dans les salles du château. Le château ! Pour dire la vérité, il s’agit d’une maison préfabriquée, dont le seul ornement remarquable (dû au travail nocturne que mon père a réussi à abattre seul et à présenter aux voisins comme une chose commandée et payée sans problème) consiste en une porte en chêne, de l’épaisseur et de la couleur d’un pain d’épices, avec une serrure et une poignée en laiton. Entrez : voici le petit hall avec une photographie de papa et de maman jeunes, serrés dans un side-car conduit par une beauté au teint hâlé ; le salon, avec tous nos meubles et biens ; la cuisine où nos parents ont la place de danser et de s’écrouler l’un sur l’autre quand ils célèbrent je ne sais quoi ; enfin les trois chambres à· coucher. Chaque membre de la famille possède un lit sur mesure et dessiné selon ses goûts, ces modèles uniques provenant de l’usine de mon père : Lits en tout genre Gesualdo-Von Bock S.A. L’usine, autrement dit le mystérieux Monsieur Finance, nous offre de surcroît, chaque printemps, une voiture neuve, toujours un modèle de luxe, portant sur ses deux ailes le slogan que nous, les enfants, trouvons obscène : Gesualdo-Von Bock —L’étoile de vos nuits. Un mensonge, car mes nuits sont noires.